Adoptée ce mercredi 13 avril, la résolution du Parlement européen sur l’Etat de droit en Pologne exprime de fortes inquiétudes sur « la démocratie, les droits de l’homme et l’Etat de droit ». La pression monte sur le pouvoir ultra-conservateur, critiqué par nombre d’ONG et une part croissante de Polonais.
Le différend Strasbourg-Varsovie prend de l’ampleur. Plus d’un mois après le refus du gouvernement polonais de publier une décision du Tribunal constitutionnel, actant sa paralysie, le Parlement européen a (enfin) réagi officiellement. Réunis ce mercredi 13 avril, les eurodéputés ont voté à une très large majorité – 513 sur les 685 présents – une résolution explicite sur l’Etat de droit en Pologne.
« Vivement préoccupé »Dans ce texte, le Parlement européen se dit « vivement préoccupé » par la « paralysie » du Tribunal constitutionnel polonais, qui « met en péril la démocratie, les droits de l’Homme et l’Etat de droit ». Une inquiétude née de la décision de la Première ministre Beata Szydlo de ne pas publier au journal officiel la décision du 9 mars du Tribunal constitutionnel. Les juges de la cour suprême avaient alors rejeté un projet de loi visant à restreindre drastiquement ses prérogatives et son indépendance vis-à-vis de l’exécutif. Les eurodéputés « demandent » également « au gouvernement polonais d’appliquer pleinement les recommandations de la Commission de Venise », organe consultatif du Conseil de l’Europe, qui a publié en mars un rapport au vitriol sur le respect de l’Etat de droit en Pologne.
« Ce n’est pas une résolution contre Beata Szydlo, ni contre le gouvernement, c’est une résolution contre l’Etat polonais », a répondu mercredi la Première ministre à la télévision publique. Et d’ajouter que le Parlement européen « aurait mieux fait de s’occuper d’autres problèmes » que connait l’UE, plutôt que de « se mêler de conflits politiques ». Si elle dénonce une ingérence de ses voisins européens, Beata Szydlo a tout de même tenu à assurer : « La démocratie en Pologne n’est pas en danger, les droits de l’homme ne sont pas violés, la liberté d’expression n’est pas menacée. Les Polonais peuvent s’exprimer librement par les manifestations, les protestations. »
Dans le viseur de RSFLa déclaration de la chef de gouvernement ferait presque oublier la profonde réforme des médias publics entérinée en janvier par le pouvoir ultra-conservateur. Une série de mesures qui ont permis la nomination de cadres du PiS (« Droit et Justice », le parti au pouvoir) à la tête des principaux médias publics. Une situation que dénonce ce mercredi 13 avril Reporters sans frontières. A une semaine de la publication de son classement mondial de la liberté de la presse, l’ONG a cité comme « raisons du recul de la liberté de la presse (…) la prise de contrôle des médias publics, y compris en Europe, en Pologne par exemple ». Et rejoint ainsi la position d’Amnesty International, qui s’exprimait en mars dans Marianne.
Si l’intervention d’ONG étrangères ne semble pas inquiéter outre-mesure le pouvoir polonais, le ressenti de la population sur les réformes et le climat politique lui fera-t-il plus entendre raison ? Dans un sondage publié ce mercredi par le journal d’opposition Rzeczpospolita, 65% des Polonais estiment que la démocratie est menacée, et 55% d’entre eux jugent nécessaire d’appliquer les recommandations de la Commission de Venise sur le Tribunal constitutionnel.
Pour l’heure, foin des critiques extérieures et internes, le gouvernement polonais est bien décidé à faire passer ses réformes d’un autre âge. Prochain dossier : une proposition de loi visant à interdire totalement l’IVG.
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