Avec François Fillon, fini les salariés, devenez "prestataire"

Le candidat à la primaire propose d’élargir le statut d’auto-entrepreneur pour encourager les entreprises à y avoir recours. Adieu l’ère du salarié, voici celle du « prestataire indépendant »…

Primaire oblige, la surenchère ultra-libérale bat son plein à droite. Dans la lignée d’une Nathalie Kosciusko-Morizet, qui assène aux jeunes qu’ils n’auront pas de CDI et plaide pour « des formes multiples et plus souples de relations contractuelles », François Fillon veut lui aussi rendre le droit du travail (beaucoup) plus flexible. L’ancien Premier ministre, partisan d’un « big-bang économique généralisé », présentait mardi 12 avril à Paris ses propositions autoproclamées « révolutionnaires », « précises » et « concrètes » sur le travail indépendant. Avec en tête de gondole le développement du statut d’auto-entrepreneur, créé sous le quinquennat Sarkozy en 2008.

Pour le candidat à la primaire, « il faut passer à l’acte 2 de l’auto-entrepreneur pour permettre son développement et capitaliser sur son succès ». François Fillon propose donc de « créer un statut juridique de prestataire indépendant » auquel les entreprises pourraient facilement avoir recours. Surtout, il veut rendre ce statut « irrévocable pendant trois ans » pour « éviter la requalification qui freine le recours » aux auto-entrepreneurs. Autrement dit, un travailleur dit « indépendant » qui travaille en réalité à temps plein pour une société, dans une relation de subordination, ne pourrait réclamer un contrat de travail en bonne et due forme… Seul garde-fou posé par le programme de Fillon : une entreprise ne pourra pas passer un contrat avec un ancien salarié licencié depuis moins de deux ans. Histoire d’éviter que les employeurs ne cèdent à la tentation de transformer du jour au lendemain leurs salariés en « prestataires ».

Les dérives du salariat déguisé

Depuis la création du statut, les dérives de certaines entreprises faisant appel à des auto-entrepreneurs pour éviter d’embaucher des salariés ne sont plus à démontrer. L’année dernière, la Cour de cassation a encore rendu deux arrêts rappelant la ligne rouge allègrement franchie par des employeurs adeptes du salariat déguisé. Il est vrai qu’en ayant recours à un auto-entrepreneur plutôt que de recruter, une entreprise s’épargne le paiement de charges sociales. De son côté, l’auto-entrepreneur est évidemment moins protégé qu’un salarié, puisque ses revenus fluctuent selon les commandes de son entreprise cliente et qu’il n’engrange pas de droits aux allocations chômage.

Mais cela n’émeut guère François Fillon, qui compte encourager la généralisation du statut en relevant le plafond des chiffres d’affaires autorisés pour les auto-entrepreneurs, en assouplissant les niveaux de certification nécessaires pour exercer une profession et même en ouvrant ce régime aux mineurs, dès l’âge de 16 ans. Et pour déminer les critiques, l’ex de Matignon a trouvé l’argument imparable : il faut inverser la courbe du chômage. « Le système que je propose permettrait à des gens sans emploi, marginalisés, de trouver un travail », assure-t-il dans L’Opinion. L’ancien Premier ministre juge même possible d’arriver « en dessous de 7% de chômage » avant la fin de son hypothétique quinquennat. Au prix de la fin du salariat ?

 

 

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