Des ségrégations anti-LGBT légalisées aux Etats-Unis

Deux lois visant à réduire les droits des personnes LGBT viennent d’être votées dans les Etats de Caroline du Nord et du Mississippi. En réaction, des entreprises ont annoncé qu’elles renonçaient à s’implanter dans ces Etats.

Célébrer leur mariage dans un restaurant ou dans une salle pourra désormais être refusé aux personnes LGBT dans le Mississippi. La faute à une loi votée ce mardi 5 avril dans cet Etat du Sud des Etats-Unis, destinée selon son gouverneur républicain Phil Bryant à « protéger sincèrement les convictions religieuses et les convictions morales« . Concrètement, les églises et les entreprises privées sont autorisées à arguer de leur conviction religieuse pour refuser d’accorder des services à certaines personnes.

A priori, cette loi va à l’encontre de ce que la Cour Suprême des Etats-Unis a décidé en juin dernier, en légalisant le mariage homosexuel dans tout le pays. Mais là où elle est pernicieuse, c’est qu’elle s’abrite derrière le sacro-saint premier amendement de la Constitution. « Cette loi renforce simplement les droits qui existent déjà d’exercer sa liberté religieuse, comme cela est stipulé dans le premier amendement de la Constitution« , a ainsi écrit sur Twitter le gouverneur de cet Etat où une grande partie de la population est croyante.

Une loi qui rappelle la ségrégation raciale

Dans les faits, donc, un restaurant ne peut toujours pas interdire son entrée à un couple homosexuel en tant que tel, comme cela était le cas pour les Noirs dans cet Etat du Sud au temps de la ségrégation raciale. Mais si le propriétaire de l’établissement est opposé au mariage de couples de même sexe, il peut en revanche refuser d’abriter tout événement lié (pré-cérémonie ou post-cérémonie de mariage, anniversaire de mariage, etc).

De grandes compagnies comme Nissan, Toyota ou MGM Resorts, toutes de gros employeurs de la région, n’ont pas tardé à réagir en se prononçant publiquement contre cette loi. La marque Nissan, dans un communiqué a ainsi rappelé qu’elle « prohibe tout type de discrimination et s’oppose à toute loi qui autoriserait les discriminations contre les lesbiennes, les gays, les bisexuels et les transgenres.« 

Avocat au Southern Povert Law Center, Jody Owens compare cette loi aux mesures ségrégationnistes du siècle dernier : « Cette nouvelle loi – comme les autres anti-LGBT dans d’autres Etats – utilise l’argument de ‘la liberté religieuse’ pour justifier la discrimination, les mauvais traitements et la bigoterie. C’est le même genre de raisonnement qu’utilisaient les suprématistes blancs à d’autres époques pour justifier l’esclavage« .

La Caroline du Nord s’en prend aux transgenres

Le Mississippi n’est pas le seul Etat américain à connaître une telle régression anti-LGBT. Le 23 mars un autre Etat républicain du Sud, la Caroline du Nord, a en effet voté une loi du même genre, à l’encontre cette fois des personnes transgenres. Elle oblige désormais ces dernières à utiliser, dans les bâtiments publics et les écoles, les toilettes qui correspondent à leur sexe de naissance. Une loi votée après que certaines municipalités, comme Charlotte, ont fait passer des ordonnances autorisant les transgenres à utiliser les toilettes qui conviennent à leur identité. Le gouverneur républicain de l’Etat, Pat McCrory, avait jugé ces autorisations contraires « au bon sens« .

Ces mesures ont également entraîné un tollé, aussi bien chez les activistes LGBT que dans le monde économique. Cent-vingt sociétés ont ainsi signé une lettre à l’intention de Pat McCrory, dénonçant sa loi. Parmi ces entreprises figure PayPal, le géant spécialisé dans le paiement sur Internet. Suite à la promulgation de la loi, PayPal a tout simplement décidé de revenir sur sa promesse d’installation à Charlotte, la capitale de l’Etat. « Devenir un employeur en Caroline du Nord, où des membres de notre personnel ne seront pas égaux devant la loi, est une position intenable« , a fait valoir l’entreprise. Au final ce sont 3,6 millions de dollars et 400 emplois qui s’envolent pour l’Etat. Pas de quoi ébranler le gouverneur, qui dit simplement « respecter le désaccord« .

Malgré ces deux cas, d’autres exemples montrent que la légalisation de l’homophobie ou de la transphobie religieuse n’est pas une fatalité dans le Sud des Etats-Unis. En Georgie par exemple, le gouverneur Nathan Deal – pourtant républicain lui aussi – a en effet mis son veto à une loi du même acabit que celles adoptées chez ses voisins. Brandissant un autre argument de « bon sens » : « Je ne pense pas que nous devons discriminer quiconque pour protéger la communauté croyante en Géorgie« .

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