Le dernier volet des aventures des deux compères « extratemporels » est un ramassis de gags laborieux au fil d’une histoire inexistante.
Cela doit faire son petit effet, lors d’un dîner en ville, de déclarer : «Moi, j’ai été blacklisté pour la projection de presse des Visiteurs 3.» Evidemment, il faut savoir placer l’anecdote dans la conversation, loin des sujets importants. Mais enfin, oui, c’est le genre de phrase qui doit faire son petit effet dans un dîner en ville, et rendre les convives bouche bée. Incrédules. Hagards.
On essayera à Marianne, promis, puisque c’est cela qui s’est visiblement passé il y a quelques jours. Les Visiteurs 3 ? On voulait absolument parler de ce film, par hommage au premier épisode qui nous avait fait rire. Mais voilà : «Il n’y aura aucune projection presse», nous répète l’agence. «Les effets spéciaux ne sont pas achevés ! On a pris beaucoup de retard.» Evidemment, la tristesse et l’amertume envahissent la rédaction tout un après-midi… Jusqu’à ce qu’on apprenne, le soir même, et totalement par hasard, que pas une, mais deux projections de presse du film de Jean-Marie Poiré auraient lieu le surlendemain, au Gaumont de Neuilly. Oh ! Les fourbes ! On rappelle l’agence, qui nous redit délicieusement : «Non, non, aucune projection de presse pour les Visiteurs 3. – Vous êtes sûr ? – Oui, monsieur, c’est sûr et certain. – Et les deux projections de jeudi, à Neuilly ? Il n’y aura pas la presse, dans ces grandes salles ?» Silence encore plus grand à l’autre bout du téléphone… Soudain, la réponse de l’attaché de presse, absurde et logique en même temps : «Ah non, mais ça, c’est différent, c’est pour la radio et la télé, parce qu’ils sont toujours beaucoup moins critiques que vous !»
On n’expliquera pas comment, le surlendemain matin, on a réussi à infiltrer la projection de presse la plus surveillée de toute la planète. Mais sachez qu’on l’a fait. Pour vous, lecteurs. Hélas, pour quel résultat ?
FROIDE VENGEANCE
Bien sûr, l’avantage de ne rien attendre d’un film, c’est de ne jamais être déçu pendant la projection, aussi secrète soit-elle. Pour mémoire, à l’issue d’un deuxième opus embourbé dans le présent avec une Muriel Robin singeant Valérie Lemercier singeant la bourgeoise, nous avions laissé nos deux héros à l’époque de la Révolution. C’est donc en pleine Terreur que nous retrouvons Jean Reno et Christian Clavier, égaux à eux-mêmes, avec quand même quelques années de plus bien visibles au compteur. Seule survivante avec eux des précédents volets : la fameuse «dame Ginette», Marie-Anne Chazel, qui occupe une minuscule place dans ces nouvelles aventures, comme s’il avait fallu la caser dans le scénario au tout dernier moment, et qu’on n’avait plus trop su où la mettre.
Le fameux trio pipi/caca/mauvaise haleine
Il faut dire que les guests sont nombreux à venir compléter la distribution : Karin Viard, Sylvie Testud, Franck Dubosc, Alex Lutz, Ary Abittan ou Lorant Deutsch. Un casting pas si mauvais que cela, qui aurait même dû être un atout, mais qui devient la grande faiblesse de cette tentative de comédie populaire. Si chacun des invités est plutôt bon dans son rôle, la farandole des personnages fait qu’aucun n’a le temps de prendre l’épaisseur qu’il aurait méritée.
Cela aurait peut-être été fait, avec un bon scénario. Hélas, là aussi, c’est raté. La narration tient la gageure de ne jamais s’inspirer des événements ni des drames de la période la plus riche de l’Histoire de France (la Révolution !), et c’est assurément l’unique tour de force du film. Pour le reste, on se perd vite dans un humour tiède avec les mêmes blagues éculées autour du fameux trio pipi/caca/mauvaise haleine. Cela ne fera rire que les enfants ; et encore, juste ceux qui ont mauvais goût. Le film s’étale tout de même sur près de deux heures, qui en paraissent quatre ou même six, à coup de blagues poussives et d’accents ringards. Rien de bien révolutionnaire, donc, pour ce retour manqué qui s’achève… en pleine Occupation. Vous comprenez qu’on craint vraiment le pire pour le prochain opus. On craint surtout d’être cette fois invités – quelle froide vengeance ! – à sa projection de presse.
En salles le 6 avril.
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