Sarkozy sous la menace d'un procès après la validation en justice des écoutes de Paul Bismuth

La Cour de cassation a validé ce mardi 22 mars les écoutes téléphoniques contestées par Nicolas Sarkozy qui lui ont valu d’être mis en examen pour corruption et trafic d’influence. De quoi est-il accusé exactement et quels sont les enjeux de cette décision ? Explications.

[EDIT mardi 22 mars, 14h30] La cour de cassation a validé ce mardi 22 mars la quasi-totalité des écoutes entre Nicolas Sarkozy, son avocat Thierry Herzog et Gilbert Azibert, un haut magistrat de la cour de cassation. L’ancien président contestait la légalité de ces écoutes, dans le cadre de sa mise en examen en juillet 2014 pour corruption et trafic d’influence. La voie est donc désormais libre pour un procès de l’ancien chef de l’Etat. Le point sur cette affaire en quatre questions.

Qu’est-il reproché à Nicolas Sarkozy ?

L’ex-président est soupçonné d’avoir tenté d’obtenir de Gilbert Azibert, alors magistrat à la Cour de cassation, et par l’entremise de son avocat historique Thierry Herzog, des informations couvertes par le secret judiciaire. Et ce, dans le cadre d’une procédure sur la saisie de ses agendas, en marge de l’affaire Bettencourt, dans laquelle il a bénéficié depuis d’un non-lieu. En échange, Nicolas Sarkozy aurait prévu d’intervenir en faveur de Gilbert Azibert pour que celui-ci obtienne un poste de prestige à Monaco, ce qu’il n’a finalement pas fait. L’ex-président y voit la preuve qu’il n’a rien à se reprocher. Mais pour les enquêteurs, ce revirement peut aussi s’expliquer par le fait que Nicolas Sarkozy et Thierry Herzog venaient alors d’apprendre que leurs téléphones non officiels étaient placés sur écoute. En effet, les conversations en question s’étaient tenues sur la ligne souscrite par Nicolas Sarkozy sous le nom d’emprunt de Paul Bismuth pour correspondre avec Me Herzog.

Pourquoi les avocats de Sarkozy contestent-ils les écoutes ?

Si les avocats disent que ces écoutes ne sont pas recevables, c’est qu’elles avaient à l’origine été ordonnées dans une tout autre affaire : celle des soupçons de financement par la Libye de Mouammar Kadhafi de la campagne électorale de Nicolas Sarkozy pour la présidentielle de 2007. C’est donc seulement par hasard que les enquêteurs sont « tombés » sur cette histoire de trafic d’influence. Devant la Cour de cassation, lors de l’audience le 28 janvier, l’avocat de l’ancien chef de l’Etat, Me Patrice Spinosi, s’en est pris à ces « écoutes au long cours, à filet dérivant« . En gros, il accuse les enquêteurs d’avoir écouté à tout-va l’ancien président pour ensuite y piocher à loisir des éléments d’accusation.

Qu’a répondu la Cour d’appel ?

Saisie par Sarkozy, Herzog et Azibert, tous trois mis en examen dans l’affaire de trafic d’influence, la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris a validé le 7 mai 2015 l’essentiel de la procédure. Mais sa décision apporte des « réponses brouillonnes, souvent erronées, régulièrement contradictoires« , a plaidé Me Spinosi, qui y a vu un « sauvetage en règle d’un arrêt malade, mal rédigé, mal motivé », « au prix d’un raisonnement acrobatique ». Tout en concédant certaines « contradictions » de la chambre de l’instruction, le premier avocat général près la cour de Cassation, François Cordier, a fait valoir que quand les juges d’instruction ont eu la certitude que la ligne souscrite au nom d’emprunt de Paul Bismuth était utilisée par Nicolas Sarkozy pour correspondre avec Me Herzog, ils en ont avisé le bâtonnier. Francis Cordier a donc également préconisé la validation de l’essentiel des écoutes, seules deux d’entres elles devant selon lui être annulées dans ce dossier.

Quelles suites possibles à cette affaire ?

Si la Cour de cassation avait décidé d’ordonner un nouvel examen du dossier, la procédure en aurait été retardée de plusieurs mois. Si elle les avait invalidées, Nicolas Sarkozy aurait vu la voie se dégager… Tout au moins une voie : le 16 février dernier, l’ancien chef de l’Etat s’est vu signifier une nouvelle mise en examen dans une autre affaire, pour financement illégal de sa campagne présidentielle de 2012. Les écoutes désormais validées, et les juges ayant terminé leur enquête, la menace d’un procès se précise pour lui.

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