Contraints de se retrouver dans la rue ce jeudi matin, à la suite de la fermeture précipitée de leur université, les étudiants de Paris 1 ont réussi à mobiliser leurs camarades contre la loi Travail. Au final, ils seront entre 69.000 et 150.000 dans toute la France à manifester.
Une semaine après une mobilisation passée sous le « revival » de l’anti-CPE, et au lendemain d’une assemblée générale confuse, les étudiants du centre Pierre Mendès-France (PMF) de Paris 1 se retrouvent ce jeudi matin au 90 rue Tolbiac. A l’ordre du jour : une AG charnière avant de participer à la marche contre la loi Travail, prévue dans l’après-midi. Mais un peu avant 9h, les étudiants en sciences humaines du site PMF trouvent les grilles de leur université closes, protégées par le personnel de sécurité. Un mail de l’université a en effet été envoyé aux responsables syndicaux dans la nuit de mercredi à jeudi, pour les avertir de la décision. « C’est une censure : on empêche de nous exprimer », s’indigne Camille, 23 ans. Avec près de 40 camarades, la jeune femme se décide à rejoindre le site principal de la Sorbonne – au Panthéon – pour tenir l’assemblée générale.
Devant la « Chapelle » de la Sorbonne, les étudiants de Tolbiac trouvent portes closes et sont accueillis par quelques dizaines de CRS. Ils apprendront plus tard que leurs camarades de Lyon 2 et Bordeaux Victoire ont eu droit au même traitement. Ayant eu vent de leur venue, la présidence de l’université a pris dans la foulée des arrêtés pour fermer ses sites centraux. « On est déçu de la réaction de l’administration, qui nous avait promis un espace de débat », regrette Vincent, 18 ans, membre du comité d’organisation de la mobilisation. La décision de l’université n’a « rien d’étonnant » pour Antoine, qui y enseigne l’Histoire, et explique que l’administration cherche avant tout « à empêcher une cristallisation des contestations à Paris 1, ainsi qu’à ce que les lycéens viennent s’y greffer ». « Ce sont les étudiants qui payent l’université et on leur dit qu’elle ne leur appartient pas », renchérit Olivier, professeur de Peinture.
« Foutus à la rue comme des terroristes « C’est donc « foutus à la rue comme des terroristes « , selon les mots d’Olivier, qu’une bonne centaine d’étudiants de toutes les antennes de Paris 1 entament une AG en plein-air. Alors qu’une cinquantaine de lycéens de Montaigne viennent saluer leurs aînés avant de partir défiler place de la Nation, les étudiants s’entendent sur les prochaines dates de la mobilisation : une AG aura lieu mardi 22 mars à la Sorbonne, une autre le jeudi 24 à Tolbiac, quelques heures avant la troisième grande manifestation étudiante. Passées les projections, les étudiants de Paris 1 engagent leur marche, direction place de la République, où les attendent les autres délégations.
Les lycéens de #Montaigne rejoignent les étudiants de @SorbonneParis1 devant #Sorbonne #LoiTravail #greve17mars pic.twitter.com/azwLeOE7Kw
— Nicolas Rinaldi (@nicolasrinald1) 17 mars 2016
Ils sont donc près de 250 à entamer cette marche au départ improvisé. Premier arrêt de la troupe : le Panthéon, où se trouvent les bureaux du président de l’Université Paris 1, Phillipe Boutry, signataire des arrêtés de fermeture. « Boutry, démission ! », scandent les étudiants, sous le regard de Catherine, employée de l’université. « Comme le disent les jeunes, on assiste à une vraie dérive sécuritaire de la part de la présidence« , soutient Catherine, qui se remémore « le soutien de l’ancien président lors de la grève du personnel de trois mois en 1989 ». Le bon vieux temps…
Crédit photo : Hervé Nathan.
« Ça va continuer ! »La marche reprend son cours et le cortège s’étoffe d’écoles en facultés. Des lycéens de Lavoisier, Fénelon ou Henri IV, des étudiants de l’institut Michelet, de Jussieu ou encore de l’ENS s’agrègent à une procession qui regroupe plus de 600 jeunes têtes. « A Normale Sup, on colle des affiches, on est pleinement mobilisés », soutient Agnès, 20 ans, qui partage ses cours entre l’ENS et Paris 1. « Vu le mouvement qui s’est créé aujourd’hui, ça va continuer ! », appuie son amie normalienne Maillane.
Alors que trois individus sont interpellés à la suite de dégradations commises sur des établissements bancaires par « quelques casseurs » vers le boulevard Voltaire selon la police, en marge d’une procession lycéenne, l’ambiance est tout autre du côté des étudiants, qui se rapprochent du Sénat. C’est donc un cortège éclectique – mais dense – qui continue sa marche, dans un esprit « bon enfant », vers la place de la République. Passant par le jardin du Luxembourg, une jeune femme se demande si « on va chercher des sénateurs ». Plus loin, au bout de la rue Saint-Antoine, certains s’apprêtent même à « reprendre la Bastille » !
« On reprend la Bastille ! » Plus de 600 étudiants parisiens en marche vers place #Republique contre #LoiTravail pic.twitter.com/3pZWdhAS9P
— Nicolas Rinaldi (@nicolasrinald1) 17 mars 2016
Accueillis par la CGT et les délégations des autres universités et lycées, les étudiants de Paris 1 entrent dans une place de la République moins remplie que le 9 mars, en raison de la moindre mobilisation des syndicats de travailleurs. Ils sont près de 9.000 manifestants à défiler dans les rues parisiennes ce jeudi selon la préfecture. Au niveau national, les autorités ont comptabilisé 69.000 manifestants, contre 150.000 pour l’Unef. Prochaine échéance : le 24 mars.
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