Pénaliser le fondamentalisme religieux par la défense de l’égalité hommes-femmes

L’égalité entre les hommes et les femmes fait partie de nos valeurs les plus fondamentales. Et nos outils juridiques devraient permettre aux procureurs de la République de poursuivre les discours publics prônant ouvertement leur remise en cause.

Dans notre démocratie si la liberté d’opinion est totale, son expression publique est elle encadrée par la loi. Cette dernière sanctionne en effet pénalement ce qu’elle ne juge pas admissible au regard de ses principes, qu’il s’agisse des propos injurieux ou diffamatoires, des propos de haine ou d’incitation à la haine ou des propos discriminatoires ou incitant à la discrimination. L’islamisme radical présente un tel danger pour la liberté des esprits et des corps que l’on ne peut que se demander, avec Mohamed Sifaoui, s’il ne convient pas de pénaliser son expression publique. Mais, encore faut-il savoir comment procéder en démocratie et vérifier ce que nos principes constitutionnels et nos lois permettent déjà et dans quelle mesure elles pourraient être améliorées dans cet objectif.

Le fondamentalisme religieux islamique est contraire à la loi française car il attente aux droits des femmes

L’égalité entre les hommes et les femmes implique notamment le droit absolu pour ces dernières de disposer de leur corps (contraception, avortement, sexualité avant le mariage, choix du conjoint, refus de l’excision coutumière, etc), de jouir de la liberté d’aller et venir, en s’habillant comme elles le souhaitent dans la seule limite de la décence communément acceptée en France et de l’ordre public, ainsi que de la liberté de travailler dans l’activité de leur choix. Ces droits et libertés font partie de nos valeurs les plus fondamentales.

Soutenir que la loi d’Allah, ou d’un autre Dieu, est supérieure à la loi des hommes, c’est délégitimer tout pouvoir politique élu démocratiquement

Jusqu’à présent, les religions se bornaient à demander à leurs pratiquants de s’abstenir d’y recourir voire, de voter démocratiquement contre leur adoption politique. C’est le jeu démocratique. Il en va autrement lorsque cette contestation se fait par la violence et le fondamentalisme, entendant imposer un renoncement à certaines valeurs par la terreur ou/et l’intimidation. Il doit en aller autrement également lorsque, sur le plan idéologique, ce qui est prôné ouvertement n’est pas seulement une critique de certaines valeurs dont les pratiquants devraient s’abstenir, ce qui est leur droit le plus strict, mais l’instauration d’une théocratie religieuse totalitaire, contraire à la République et à toutes ses valeurs, imposant les siennes à tous les citoyens, quelles que soient leurs convictions.

Soutenir que la loi d’Allah, ou d’un autre Dieu, est supérieure à la loi des hommes, y compris pour gouverner un pays, c’est délégitimer tout pouvoir politique élu démocratiquement, qui ne procéderait pas d’une désignation par les autorités religieuses. C’est donc se prononcer contre la forme républicaine et démocratique du régime politique en France et ceci peut faire encourir aux mouvements qui le prônent une dissolution sur le fondement de la loi du 10 février 1936. C’est en outre une remise en cause de plusieurs dispositions constitutionnelles protégeant l’égalité des sexes : l’article 1er de la Constitution mais aussi son Préambule qui prévoit que « La loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l’homme». Ainsi, préconiser l’instauration en France de la « Charia », sous le prétexte qu’il s’agirait de la seule loi légitime à régir la vie des français, même non-musulmans, c’est aussi proposer d’anéantir une grande partie des droits fondamentaux, notamment ceux des femmes, que notre Constitution et que nos lois garantissent aujourd’hui.

La loi pénale protectrice de l’égalité des droits, outil de répression du fondamentalisme religieux islamique

La discrimination est définie par l’article 225-1 du code pénal, comme étant notamment : «Toute distinction opérée entre les personnes physiques à raison de leur sexe, de leurs mœurs, de leur orientation sexuelle, de leur situation de famille… de leur appartenance ou de leur non-appartenance vraie ou supposée à une religion déterminée… ».

Mais, en application de l’article 225-2 du code pénal, la discrimination entre les sexes n’est punissable que si elle consiste dans le refus de fourniture d’un bien ou d’un service (refus de vente par exemple), dans l’entrave à l’exercice normal d’une activité économique quelconque, ou dans le refus d’embaucher ou de prendre en stage une femme. Le champ est donc plus réduit pour la discrimination en fonction du sexe que pour la discrimination en fonction de la race ou de la religion.

Dans l’état actuel de notre loi pénale, le législateur s’est donc borné à tirer les conséquences de l’article 1er de la Constitution dont l’objet est limité aux champs politiques et professionnels et il a « oublié » le principe d’égalité homme/femme rappelé par son Préambule de manière beaucoup plus large et générale. Force est de devoir l’écrire, la loi actuelle « n’épuise pas sa compétence » car elle reste en retrait de la portée des principes constitutionnels qu’elle doit pourtant mettre en œuvre pour une égalité réelle. Il conviendrait donc de protéger davantage les droits des femmes au plan pénal, a minima comme pour les « races » ou les religions !

Au-delà de la provocation à la simple discrimination à raison du sexe, la provocation à la haine ou à la violence envers une ou des femmes, parce qu’elles sont de sexe féminin, constitue cependant aussi un délit punissable au regard des article 23 et 24 de la loi du 28 juillet 1881. Ces faits de provocation sont constitués par tout appel public à cette discrimination, haine ou violence par discours oral, écrits, affiches, supports de la parole ou de l’image (comme internet), etc, ce qui est très large (article 23 de la loi du 29 juillet 1881).

Interdire la tenue de certaines réunions publiques dont les organisateurs prônent ouvertement l’organisation dans notre société d’une discrimination en défaveur des femmes

Même encore imparfaits, ces outils juridiques devraient permettre déjà aux procureurs de la République, de poursuivre les discours publics prônant ouvertement les châtiments corporels pour l’épouse, l’interdiction pour les femmes d’accéder à certaines fonctions salariales ou économiques, de conduire une automobile, etc.. Ceci pourrait faire l’objet d’une simple circulaire du Garde des Sceaux à ses parquetiers, invités à se montrer plus attentifs à la répression du prosélytisme islamiste radical, pris sous son angle sexiste. Le simple fait de promouvoir l’instauration de la charia comme règle d’organisation sociale et juridique d’un Etat islamique en France, caractérise ces discriminations et appels à la violence à l’encontre des femmes.

Mais ce substrat pénal pourrait aussi être utilisé par l’autorité administrative locale ou nationale pour interdire la tenue de certaines réunions publiques dont les organisateurs prônent ouvertement l’organisation dans notre société d’une discrimination en défaveur des femmes ou le recours à la violence contre elles, légitimée si elle est pratiquée par leur mari, entre autres. En effet, dès lors que les propos publics tenus ou devant être tenus en réunion caractérisent une infraction pénale, la réunion peut être qualifiée d’illicite et contraire à l’ordre public, justifiant son interdiction administrative, sans violer le principe de la liberté d’expression, celui de la liberté de conscience ou celui de la liberté de réunion.

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Il appartient d’ores et déjà à ceux qui exercent ces fonctions judiciaires ou administratives de mettre en œuvre ces outils légaux par la voie judiciaire, ou aux associations de lutte contre les discriminations prévues à l’article 2-6 du code de procédure pénale de se constituer partie civile contre les auteurs de ces délits, pour pallier l’éventuelle carence de ces autorités  en la matière.

Il conviendrait aussi que demain, un islamiste sur un plateau de télévision qui refuse de serrer la main d’une femme ministre, parce qu’elle est femme, soit passible de poursuites pénales, ce qui n’est pas encore le cas aujourd’hui. Comment ne pas le souhaiter ? Ce ne devrait plus être une simple opinion admise sans barguigner juridiquement, mais un délit poursuivi au regard du principe d’égalité homme/femme puisqu’elles ne sont pas, dans nos démocraties, des citoyennes de seconde zone mais les égales des hommes.

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