Le ministre de l’Intérieur saoudien, Mohammed ben Nayef, prince héritier de l’Arabie Saoudite, a reçu vendredi des mains de François Hollande la Légion d’honneur. Mais l’histoire ne dit pas s’il est récompensé pour ses décapitations, ses amputations, ses lapidations…
Un scandale ? Quel scandale ? Invité ce lundi 7 mars de la matinale de France Inter, le ministre des Affaires étrangères Jean-Marc Ayrault est notamment revenu sur la polémique née de la remise en catimini, par François Hollande, de la Légion d’honneur au ministre de l’Intérieur saoudien, Mohammed ben Nayef, prince héritier de l’Arabie Saoudite. « Il y a parfois des traditions diplomatiques qui peuvent étonner, il faut le prendre comme tel », a balayé l’ex-Premier ministre, qui a manifestement déjà bien adopté les tournures de langage propres à ses nouvelles fonctions.
Spécialiste dans le maniement du sabre, qu’il utilise de préférence pour faire couper les têtes des ses opposants, Mohammed ben Nayef a été reçu par la France ce vendredi 4 mars. Pour l’occasion, François Hollande avait une fois encore sorti le grand jeu, mais s’est bien gardé de le dire.
L’Elysée n’a en effet pas communiqué sur la finalité de cette visite. C’est donc l’agence de presse saoudienne SPA qui a pallié les lacunes françaises : en réalité, Mohammed ben Nayef a reçu, nous a-t-elle appris, le fameux ruban des mains du président de la République. Une décoration qui, faut-il le rappeler, a pour vocation selon le site Internet de l’Institution de récompenser tous ceux qui « œuvrent au développement de la France, à son rayonnement », et « à sa défense. »
Le prince héritier serait donc de ceux-là. Son oeuvre doit en effet être saluée dans le domaine de la défense des droits de l’Homme. En moins de trois mois, 70 personnes ont par exemple été exécutées en Arabie saoudite. La dernière mise à mort ayant eu lieu pas plus tard que ce dimanche 6 mars. A ce rythme-là, le royaume s’apprête à pulvériser cette année son record de 153 exécutions réalisées en 2015.
Face aux critiques, l’Elysée minimise, évoquant une « pratique protocolaire courante ». Et Jean-Marc Ayrault d’embrayer ce lundi, donc, pour défendre une « tradition diplomatique » :
« J’ai vu les réactions, on peut les comprendre, mais je crois que nous discutons avec ce pays (…) Et de quoi nous discutons ? Nous discutons de la paix en Syrie et l’Arabie saoudite a un rôle à jouer (…) Avec qui je discute ? Je ne discute qu’avec ceux qui partagent à 100% notre conception de la démocratie et nos valeurs ? »
Discuter, c’est une chose, décorer en est une autre. Mais il s’agissait aussi de renvoyer l’ascenseur : François Hollande lui-même a été décoré de l’ordre suprême du Royaume qui pratique la Charia, c’est-à-dire la loi islamique dans son interprétation la plus stricte, avec peine capitale, amputation, lapidation… Ironie du sort, cette polémique intervient au lendemain de la parution de l’interview que François Hollande a accordée au magazine Elle à l’approche de la journée mondiale des droits des femmes, dans laquelle il érige le « respect » de celles-ci en valeur « absolue ». Voilà qui a dû lui donner un sujet de conversation avec son décoré du vendredi.
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