Déradicalisation : premier échec pour la méthode "Dounia Bouzar"

Elle dit avoir accompagné un millier de jeunes dans leur processus de déradicalisation. Pour cela, la très médiatique anthropologue Dounia Bouzar a créé un Centre de prévention contre les dérives sectaires liées à l’islam (CPDSI). Inondé par les subventions publiques, le bilan de la structure est cependant incertain. Le départ (avorté) en Syrie, révélé cette semaine par Europe 1, de l’une des premières adolescentes suivies par Dounia Bouzar, érigée en modèle, le rappelle une nouvelle fois.

Elle avait fait de Léa, une jeune adolescente de 17 ans qui projetait de se faire exploser devant une synagogue de Lyon en 2014, un emblème de sa méthode de « déradicalisation ». Léa, un nom d’emprunt, a en effet été l’une des premières à être suivie par la très médiatique anthropologue Dounia Bouzar, qui s’est rapidement imposée comme une référence pour les pouvoirs publics, notamment pris de court par l’afflux des départs en Syrie.

A travers son Centre de prévention contre les dérives sectaires liées à l’islam (CPDSI), Dounia Bouzar a ainsi multiplié les entretiens de déradicalisation avec l’intéressée, qui suivait en parallèle une formation dans le domaine du social et avait accepté un suivi psychologique. Officiellement, Léa présentait donc tous les signes d’une réinsertion réussie.

Très entourée, y compris par sa famille, cette dernière est pourtant parvenue « à duper tout le monde ». En réalité, révèle Europe 1, cela faisait plusieurs semaines que Léa était en contact par téléphone avec un recruteur pour tenter de rejoindre l’Etat islamique en Syrie.

Une stratégie de dissimulation reconnue par la propre adolescente lorsque son père, alerté par les policiers qui ont placé la jeune femme sur écoute, la rattrape « in extremis » avant son départ en décembre dernier. Actuellement en prison, elle aurait non seulement reconnu les faits mais aussi manifesté son « adhésion » aux attentats du 13 novembre.

Un audit du dispositif Bouzar

Un échec qui survient alors que le bilan réel du Centre de prévention créé par Dounia Bouzar, et sur ses méthodes, est de plus en plus questionné. L’association a été inondée de subventions publiques ; « 900.000 euros depuis dix-huit mois » précise le JDD, et certains, à l’image de la sénatrice centriste Nathalie Goulet, demandent des comptes. Présidente de la commission d’enquête sur les réseaux djihadistes, elle a demandé au ministère de l’Intérieur de lui « fournir un bilan circonstancié des résultats du CPDSI ».

Dounia Bouzar, quant à elle, affirme sur son site internet avoir suivi plus de 1000 jeunes depuis avril 2014, 1059 exactement, dont 234 « désembrigadés » grâce à son action. Des chiffres invérifiables. 

Par ailleurs, le JDD expliquait en décembre que des conflits d’intérêts pesaient sur la structure. Outre le fait d’avoir embauché des membres de sa famille, en particulier sa fille qu’elle a placée à la tête de Bouzar Expertises – son entreprise -, l’anthropologue jongle avec ses missions publiques et ses intérêts privés. Bouzar Expertises vend, de fait « des prestations de formation à des collectivités susceptibles de travailler avec… l’association », décrivait l’hebdomadaire.

Un rabattage qui n’est pas du goût de « l’inspection interministérielle, qui audite actuellement le dispositif ». Dounia Bouzar a-t-elle senti le vent tourner ? Elle a en tout cas annoncé vouloir interrompre sa collaboration avec les autorités et dissoudre son centre de prévention au printemps, en raison dit-elle, de la révision constitutionnelle et de la déchéance de nationalité portées par le gouvernement.

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