"Kamel Daoud est victime d'une fatwa laïque" de la gauche, dénonce Fawzia Zouari

Après avoir une première fois défendu Kamel Daoud dans « Jeune Afrique » puis dans les colonnes de « Libération », la romancière et journaliste franco-tunisienne Fawzia Zouari était ce mardi 1er mars sur France Inter, où elle a souligné que les attaques d’une certaine gauche contre l’écrivain algérien convergent avec celles qu’il essuie de la part… des islamistes.

« Pour nous c’est une très mauvaise nouvelle (…), ces voix-là nous sont nécessaires plus que jamais ». Après sa tribune sur Jeune Afrique puis dans Libération, Fawzia Zouari, journaliste et romancière franco-tunisienne, est venue dénoncer, ce mardi 1er mars au micro de France Inter, une « sorte de fatwa laïque dont Kamel Daoud est victime ». En cause, ce texte publié par un collectif de 19 chercheurs qui s’attaquaient aux analyses par l’écrivain algérien des événements de Cologne. Une parole qui, selon eux, « alimente les fantasmes islamophobes d’une partie croissante du public européen, sous le prétexte de refuser tout angélisme » et « recycle les clichés orientalistes les plus éculés ». Résultat, Kamel Daoud avait annoncé vouloir arrêter le journalisme pour se consacrer à son travail de romancier.

« Une forme de banalisation de l’islamisme en France »

Fawzia Zouari appelle donc à une émancipation de ces penseurs arabes qui ont un lien avec la France face aux interdits posés selon elle par une partie de la gauche française : « Est-ce que l’on peut encore accepter ce discours un peu dreyfusard de la gauche et une sorte de sociologie de salon qui nous dit ce qu’il faut dire (…), est-ce que nous n’avons pas à faire entendre notre propre voix ? » Dans son texte publié dans les colonnes de Libération, la romancière s’attaquait ainsi à « cette tendance à dicter aux intellectuels arabes ce qu’ils doivent dire ou ne pas dire sur leurs sociétés [qui] confine au néocolonialisme. Elle relève d’un tropisme qui rend incapable de nous voir autrement que comme des ‘protégés »‘ Elle refuse l’idée qu’il puisse exister des Arabes souverains dans leur tête, des musulmans qui contestent leurs traditions, désobéissent aux consignes de bien-pensance, fissurent les échafaudages spéculatifs autour d’un Orient fantasmé. »

Et de pointer sur France Inter l’étrange convergence entre les critiques de ces chercheurs et les attaques des islamistes dont fait l’objet Kamel Daoud en Algérie : « C’est une forme de fatwa laïque qui va exactement dans le même sens que les accusations dont il est victime de la part des islamistes, c’est ça le problème ». Car justement, pour l’écrivaine, la pensée critique de Daoud ainsi que d’autres intellectuels est plus que nécessaire en cette période où « nous sommes en train d’assister à une forme de banalisation de l’islamisme en France ». Et d’appeler à un changement de posture, à « de nouveaux discours à mettre en route, à réinventer pour que la question musulmane soit posée (…) et qu’il n’y ait pas d’omerta sur l’islam ». Alors même, défend-t-elle, qu’il y a « une voie de l’islam que l’on ne veut pas entendre (…) une voie intermédiaire, il y a une voie d’une majorité laïque musulmane (…) et cette majorité là a envie de parler, de dire ‘je’, de rentrer dans l’histoire, de n’être plus objet d’étude ».

Un combat de la pensée porté par des intellectuels comme Daoud, Zouari ou encore Boualem Sansal. Le chemin sera long.

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