Dans une tribune publiée ce mercredi 24 février dans « Le Monde », la maire de Lille Martine Aubry reproche, avec l’écologiste Daniel Cohn-Bendit et d’autres signataires, à François Hollande et Manuel Valls de conduire à l' »affaiblissement durable de la France ». Mais n’esquisse toujours pas un mouvement pour changer le cours de la gauche.
Martine en a ras le bol, Martine trouve que “trop c’est trop”… Retranchée après son échec à la primaire socialiste en 2011 dans sa ville de Lille, la maire socialiste a pris l’habitude, telle une murène, d’en surgir par à coups depuis 2012 pour mordre le mollet du gouvernement, avant de repartir aussitôt se planquer dans sa mairie.
Cette fois, la charge prend la forme d’une tribune au vitriol qu’elle co-signe dans le journal Le Monde daté de ce mercredi 25 février avec d’autres personnalités de la gauche (dont Daniel Cohn-Bendit, Axel Kahn, François Lamy et Jean-Marc Germain). Laquelle nous promet des heures sombres dès son titre : “Un affaiblissement durable de la France se prépare”.
La charge concerne l’accumulation des “motifs d’insatisfaction sur les politiques menées depuis 2012”. “La gauche avait déjà assisté, incrédule, en janvier 2014, au pacte avec le Medef qui se révéla un marché de dupes”, commencent les signataires du texte, résumant le pacte de responsabilité à “41 milliards d’euros mobilisés pour rien”.
“Puis, nous nous sommes vu infliger, à l’hiver 2015, ce désolant débat sur la déchéance de nationalité”, poursuivent Martine Aubry et consorts et, “par une regrettable accélération du temps, la semaine dernière, ce fut la meurtrissure de l’indécent discours de Munich, à propos des réfugiés”. Là, c’est Manuel Valls qui est directement visé, pour avoir mis en cause l’accueil massif de réfugiés voulu par Angela Merkel.
Le rappel à l’ordre est sévère pour le chef du gouvernement :
“Non, Angela Merkel n’est pas naïve, Monsieur le premier ministre (…) Non, elle n’a pas mis en danger l’Europe, elle l’a sauvée. Elle l’a sauvée du déshonneur qui aurait consisté à fermer totalement nos portes à toutes ces femmes, ces hommes et enfants fuyant les persécutions et la mort et en oubliant ceux qui chaque jour perdent la vie en Méditerranée”.
En venant enfin au sujet du moment, le projet de loi El Khomri, les 18 en colère s’exclament : “Aujourd’hui, voici que l’on s’en prend au code du travail !” Et de rappeler :
“La gauche a appris des mouvements ouvriers qu’il n’y a pas de liberté sans égalité. Ce n’est pas une affaire de tabous. Le droit n’enferme pas, il libère (…) Pour sortir de l’impasse, il faut de vraies réformes, synonymes de progrès économique, social, écologique et démocratique”.
S’il est co-signé par plusieurs personnalités, la patte de Martine Aubry est sensible dans ce texte. Ne serait-ce que dans la formule qui ouvre la charge : “Trop, c’est trop !”. Laquelle rappelle son feux “ras le bol !” lancé au sujet d’Emmanuel Macron à l’automne dernier, ou encore « le bon sens » de son “Quand c’est flou, c’est qu’il y a un loup”, adressé à François Hollande durant la primaire qui les avait opposés. Des formules courtes, sèches et surtout marquantes.
Mais si elle est reine des formules simples et chocs, Martine Aubry excelle moins dans leur traduction politique. Depuis 2012, la velléitaire s’est en effet tenue à bonne distance de la fronde socialiste au Parlement, qui manque pourtant cruellement d’une figure de proue et qu’elle aurait pu faire éclore au-delà des murs de l’Assemblée. Et l’on se souvient surtout que lors du dernier Congrès du Parti socialiste, à Reims en juin dernier, alors qu’une partie de la gauche comptait sur la maire du Nord pour ériger des dunes contres les vagues libérales du duo Valls-Macron, celle-ci avait laisser planer le suspense sur une motion à elle jusqu’à le dernière minute… avant de se rallier in extremis à celle de Jean-Christophe Cambadélis, soutenant le gouvernement dont elle fustige aujourd’hui si durement la politique. Alors, la murène finira-t-elle par quitter définitivement sa grotte, ou continuera-t-elle a claquer des dents dans le vide ?
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