Les pas prudents de Hollande et Ayrault pour une Europe à deux vitesses

Au surlendemain de l’accord entre le Royaume-Uni et l’Union européenne, le nouveau ministre des Affaires étrangères admet l’existence d’une Europe à deux vitesses dans les colonnes du « JDD ». Jean-Marc Ayrault exhorte aussi la France et l’Allemagne à reprendre les commandes du paquebot européen.

Après un énième lot de passe-droits accordé au Royaume-Uni pour tenter d’éviter sa sortie de l’Union européenne (« Brexit »), Bruxelles a la gueule de bois. Le résultat du référendum britannique, fixé au 23 juin, n’y changera rien : les interminables négociations entre les deux parties auront confirmé un message que chacun des 28 États membres avait déjà bien compris, l’Europe, désormais, c’est à la carte.

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« Il y a une Europe différenciée »
Dans ce contexte, le nouveau ministre des Affaires étrangères Jean-Marc Ayrault ne peut faire autrement que de constater l’existence d’une « Europe différenciée », dans une interview accordée ce dimanche au JDD. Au cours d’un entretien sur France Inter vendredi 19 février, François Hollande avait pris acte de la nécessité d’une Europe à plusieurs vitesses, qui serait organisée autour de la zone euro ou des fondateurs de l’UE : « Il y a forcément une dimension fédérale dans l’Europe. À plusieurs pays, nous devons aller vers plus de fédéralisme ».

Terrible aveu d’impuissance, en vérité, de la part des responsables d’un pays fondateur de l’UE qui voit l’unité européenne se désagréger sous ses yeux, 66 ans après la fondation de la Communauté européenne du charbon et de l’acier. Alors, l’exécutif tente de reprendre la main et Jean-Marc Ayrault promeut l’idée d’un « noyau dur » européen porté par la France et l’Allemagne pour « ceux qui veulent aller vers plus d’intégration ». Reprenant les propos du chef de l’État tenus sur France inter vendredi : « Il faut aussi pouvoir avancer plus vite et plus fort avec un noyau dur« .

Inventer une Europe avec de vrais instruments de politique commune
Jusqu’à quel point ? Dans le numéro de Marianne en kiosques cette semaine, Jacques Julliard exhorte Jean-Marc Ayrault à faire « une Europe à deux ». Mais pas sur le modèle du moteur européen fatigué que nous connaissons, tractant péniblement 26 passagers bougons. Notre éditorialiste propose de renverser la table avec une Europe franco-allemande – immédiatement renforcée de l’Italie, du Bénélux, de l’Espagne et sans doute du Portugal – qui instituerait « la mise en commun du budget, de la diplomatie et de la défense, c’est-à-dire des instruments d’une politique commune, à l’exclusion de tout ce qui relève de la part de souveraineté à laquelle Français et Allemands sont justement attachés : la culture, l’éducation. »

Ayrault et Hollande oseront-ils renverser la table européenne avant 2017 ?
Une façon pour le duo Ayrault-Hollande de faire « tapis au casino » avec un projet qui « à tous les niveaux changerait radicalement la donne ». La radicalité n’étant pas le trait de caractère le plus saillant de l’ancien Premier ministre, on peut douter d’une telle initiative dans les mois à venir. Dans le JDD, le germaniste se contente de dire qu’il est « convaincu que l’Allemagne et la France ont la responsabilité de préparer la relance du projet européen. » Avant de diluer son propos dans une antienne qui a l’avantage de n’engager à rien : « Il faut donc recréer une envie d’Europe et redonner à tout le monde des raisons d’aimer l’Europe ». « Étonnez-moi, Benoît », chantait Françoise Hardy. « Etonnez-nous, Ayrault », écrit Julliard. À suivre.

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