La fuite dans la presse cette semaine d’une âpre dispute entre l’animateur star de D8 et un journaliste du service Sports de Canal+ braque de nouveau les projecteurs sur l’émission « TPMP » qui, devenue une forteresse au fur et à mesure de la progression de ses audiences, assume de plus en plus la référence de son titre : « Touche pas à mon pote ». En l’espèce, l’intouchable Cyril Hanouna.
Toutes les idoles ont leurs pourfendeurs, et les religions leurs hérétiques. Cyril Hanouna, qui s’est hissé en quelques années à peine au sommet de l’Olympe du PAF, devenant l’animateur les plus rentable du petit écran, n’échappe pas à la règle. Sauf que ce chantre de la coolitude poussée à l’extrême ne s’applique pas toujours ses propres préceptes… Ces derniers mois, plusieurs épisodes ont révélé une face beaucoup moins fun du personnage que sa communication « bisous-keur-lol » ne le laisse présager.
Le dernier bad buzz Hanouna en date, et de loin le plus gênant, est parti cette semaine du Canard enchaîné. C’est l’histoire d’un certain Julien Cazarre, journaliste dans l’autre service phare du groupe Canal+, les Sports, qui se serait rendu coupable de lèse-babajesté. Ainsi le 5 février dernier, le jeune homme se raconte au site francefootball, livrant au passage une confidence impensable, résumée dans un titre choc : « J’ai dit non à Cyril Hanouna » (sic).
De quoi s’agit-il ? D’une proposition qui lui a été faite, lui qui traite dans son émission l’actualité footballistique sur un mode humoristique, de rejoindre l’univers Hanouna que D8 décline désormais à toutes les sauces. Sauf que, vachard, Julien Cazzare s’explique en ces termes :
« On m’a aussi proposé ‘Touche pas à mon Sport’, le copier-coller de ‘Touche pas à mon poste’ sur D8. Cyril Hanouna m’a appelé, m’a dit qu’il aimait bien ce que je faisais, malheureusement, je ne peux pas en dire autant ! C’est pas du tout ma came. Gilles Verdez c’est le dîner de cons et Enora Malagré c’est la vulgarité à l’extrême. Ça ne m’intéresse pas. J’ai besoin de bosser avec des gens que j’admire un peu. »
Grondement du côté de l’Olympe… Et « résultat, rapporte le Canard, durant tout le week-end (Julien Cazarre) a essuyé les coups de fil d’Hanouna et compagnie », recevant « insultes » et « menaces de lui ‘péter la gueule’« . A tel point que le garçon a fini par se rendre au commissariat pour porter plainte contre l’animateur et sa fidèle chroniqueuse Enora Malagré, ce que confirme le site Ozap.
Contactée à ce sujet par Marianne, la direction de Canal+ assure que le problème est aujourd’hui réglé : « Ils se sont disputés en effet il y a dix jours, c’était un peu chaud mais ensuite c’est redescendu aussi vite, Julien a retiré sa plainte et leur relation est apaisée« . De son côté, Cyril Hanouna s’est expliqué en ces termes sur le site de Jean-Marc Morandini : « C’est vrai que j’ai pris mon téléphone pour lui parler. Je lui ai dit ce que je pensais car je défends toujours mes équipes (…) Je lui ai simplement dit que je voulais qu’on se rencontre pour en parler les yeux dans les yeux (…) On s’est reparlé depuis et tout va bien« . Au passage, personne ne nie que l’animateur ait pu dépasser les bornes.
Etonnante attitude a priori, que celle prêtée à Cyril Hanouna dans cette histoire, quand on se souvient avec quel fair-play l’intéressé avait réagi, la semaine dernière, à une autre vacherie balancée cette fois par Charlie Hebdo : la fameuse une le représentant en gros moustique transmettant « le virus qui rend con« . Dans une vidéo très Charlie — « Ce que j’en pense c’est très simple, c’est qu’il faut rigoler » —, l’animateur avait pris le dessin signé Coco au pied de la lettre, enfilant un costume de moustique pour aller distribuer quelques imprimés de l’hebdomadaire à des passants dans la rue. Classe.
Mais hors cas Charlie, la team Hanouna se distingue plutôt, d’habitude, par les griffes qu’elle sort dès qu’elle est critiquée. En décembre dernier, lors des élections régionales, son leader avait été rabroué par quelques journalistes sur Twitter quand il avait accusé, dans un tweet-coup de gueule, la profession d’une « irresponsabilité » ayant fait le jeu du FN. Dans l’émission suivante, la plupart de ses animateurs s’étaient alors livrés à ce qu’on appellerait, en langage TPMP, un concours de lèche… Enora Malagré n’ayant pas de mots assez forts pour louer le « courage » de son mentor, tandis que Gilles Verdez lui suggérait carrément de se présenter à la présidentielle.
Un comportement de groupies qui rejoint celui des « Fanzouzes » que rassemble « Baba » par millions sur les réseaux sociaux (plus de 3 millions sur « Teuteur« ). A coups de « les chéries » ou « les beautés« , Cyril Hanouna entretient avec eux un rapport affectif qui fait des merveilles dans son public adolescent. En échange, ceux-ci se comportent sur ces mêmes réseaux comme de fidèles « little monsters », prompts à dézinguer sans sommation quiconque égratigne l’idole. En témoigne encore, ce mercredi, ce nouveau hashtag qui s’est hissé en sujet le plus discuté : #JAimePlusCyrilQue, dirigé souvent contre… Julien Cazarre, l’impertinent. Lors de l’épisode Charlie, #ToujoursLaPourCyril avait eu tout autant de succès.
Fin janvier, l’émission avait encore fait parler d’elle en négatif suite à une séquence affligeante au cours de laquelle l’un des chroniqueurs, Mathieu Delormeau, s’était vu vider un bol de nouilles dans le slip. L’émission avait inspiré une chronique au vitriol de Bruno Donnet sur France Inter : « J’ai vu quelque chose qui, à ma connaissance, est sans précédent dans l’abjection à la télévision« . Constatant que le blond de NRJ12 était devenu, depuis son arrivée dans l’émission en septembre, « le souffre-douleur » de toute la bande, le journaliste avait regretté qu’avec de telles séquences, TPMP « normalise un comportement qui ne l’est pas » : l’humiliation, le harcèlement au travail, ou, transposable aux fans de Hanouna, le bizutage à l’école.
Toujours prompt à tout relativiser — sauf les critiques —, Cyril Hanouna avait livré cet argumentaire pour défendre ses nouilles : « Je ne sais pas où vivent ces gens mais ils n’ont pas compris. En fait, il faut qu’ils sortent un peu, qu’ils aillent voir des gens, qu’ils échangent un peu, qu’ils arrêtent de rester entre eux ! Ils ne comprennent pas que les jeunes aujourd’hui ne font que se charrier, s’amuser, se vanner ». Certes, mais les adultes ne sont-ils pas censés, justement, leur ériger quelques autres modèles de valeurs ? La réponse viendra désormais de Canal+, selon que le groupe recadre sa bande d’ados attardés ou qu’elle la laisse tout se permettre au nom de l’audience sacrée. Car derrière le guignol, c’est bien l’audience, la vraie religion.
Powered by WPeMatico
This Post Has 0 Comments