La Cour de Cassation vient de rendre un arrêt décisif dans l’autre versant de l’affaire Bygmalion : rien ne s’oppose plus au renvoi devant le tribunal correctionnel de Bastien Millot, Patrick de Carolis pour France Télévisions, Camille Pascal et la société Bygmalion.
L’ex-agence de communication Bygmalion est décidément au cœur de l’actu. Après la mise en examen de Nicolas Sarkozy lundi pour « financement illégal de campagne électorale » – certains de ses meetings organisés par Bygmalion en 2012 ayant fait l’objet d’un vaste système de fausses factures – la Cour de Cassation vient de rendre public un arrêt décisif dans l’autre volet de l’affaire : les contrats passés entre cette boite de com’ et France Télévisions.
Suite à une plainte avec constitution de partie civile déposée en janvier 2013 par le syndicat CFE-CGC de l’audiovisuel public, le juge Renaud Van Ruymbeke avait été chargé de faire la lumière sur les nébuleuses prestations de services passés entre Bastien Millot, l’un des fondateurs de Bygmalion, proche de Jean-François Copé, et France Télévisions, groupe que le même Millot avait quitté pour fonder précisément… Bygmalion. On n’est jamais si bien servi que par son ancien employeur. Entre 2008 et 2011, France Télévisions et son président, Patrick de Carolis, nommé par le CSA sous Jacques Chirac, avaient signé pour plus d’un million d’euros de contrats à Bygmalion (accompagnement stratégique, veille internet, réponses au courrier des téléspectateurs…) Un joli pactole pour la toute jeune société de Bastien Millot. Premier problème : Millot, avant de se lancer dans ce lucratif business, était directeur délégué auprès de Patrick de Carolis, en charge de la stratégie, de l’innovation et de la communication. Autant dire qu’il avait quelques entrées auprès du patron. Deuxième problème : ces mirifiques contrats n’avaient donné lieu à aucun appel d’offres, aucune consultation d’autres prestataires ni aucune publicité.
De mirifiques contrats sans appel d’offres
Mis en examen par le juge Van Ruymbeke pour, respectivement, « favoritisme » et « recel de favoritisme », Patrick de Carolis et Bastien Millot contestaient être soumis au Code des marchés publics. En juillet 2015, la chambre de l’instruction de la Cour d’Appel de Paris les avaient renvoyés dans les cordes en validant la base légale sur laquelle le juge Van Ruymbeke avait procédé à leurs mises en examen. Dans un arrêt mis en ligne le 17 février 2016, la Cour de Cassation enfonce le clou, et clôt le débat. Elle reconnaît que les marchés litigieux ont été conclus par « France télévisions, société de droit privé, régie par le droit des personnes privées », avant d’ajouter aussitôt que « cette société est investie d’une mission de service public, que l’Etat détient l’intégralité de son capital, que ses ressources financières essentielles proviennent de la redevance audiovisuelle, que France télévisions est soumise au contrôle économique et financier de l’Etat » et « qu’il est, dès lors, impossible de soutenir que les marchés de prestation de services, notamment, comme en l’espèce, ceux passés par France télévisions avec un partenaire de droit privé, la société Bygmalion, sont des contrats de droit privé, soumis exclusivement au droit privé. »
Conclusion : rien ne s’oppose plus aujourd’hui au renvoi devant le tribunal correctionnel de Bastien Millot, Patrick de Carolis, Camille Pascal (l’ancien secrétaire général de France Télévisions et ex-conseiller de Nicolas Sarkozy à l’Elysée) et de la société Bygmalion en tant que personne morale. Bygmalion/UMP ou Bygmalion/France Télé : lequel des deux procès s’ouvrira le premier ? Les paris sont lancés.
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