Lundi au 20h de TF1, Marine Le Pen sortait de son silence après deux mois d’abstinence médiatique. Un retour qui sent bon le plan com’ imaginé par ses « spins doctors ». Preuve en est, une surprenante citation de Raymond Aron, un intellectuel qui jusque-là n’était pas vraiment une référence au FN. Un moyen supplémentaire pour lisser toujours plus son image en vue de la présidentielle de 2017.
L’interview se déroulait normalement lundi soir sur le plateau du journal de 20 heures de TF1. Enfin, presque normalement, tant il y avait quelque chose de forcé dans le sourire ultra bright affiché par Marine Le Pen, elle que les dernières photos prises au Parlement européen et datant de la semaine dernière, montrent fatiguée et accablée. A l’évidence, la cheffe du FN qui apparaissait sur un plateau de télé pour la première fois depuis près de deux mois, après s’être imposée une diète médiatique aux vertus tout droit issues des manuels de communication, avait réglé son « 20 heures » au millimètre. Pour être parfaitement raccord avec sa dernière affiche dont le slogan est « la France apaisée », il fallait donner l’image d’un leader souriant, calme, bien dans sa peau et dans ses pompes.
Pourquoi Marine Le Pen a-t-elle choisi de sortir de son silence ce lundi soir sur la chaîne la plus regardée de France à cette heure-là ? Parce que le week-end précédent s’était tenu un séminaire du parti, le premier de ce genre, étalé sur trois jours pleins. L’initiative avait été savamment médiatisée pour accréditer l’idée que contrairement aux idées répandues, le parti de Marine Le Pen débat et s’ouvre aux idées venues de l’extérieur et qu’il n’est ni sectaire ni autoritaire. N’avait-on pas invité Robert Ménard ? Le remuant maire de Béziers refuse d’entrer au FN tout en étant très proche et ose dire que si Marine Le Pen veut gagner en 2017, elle doit s’écarter de la ligne de son parti, sur l’euro notamment, et même renoncer à le présider pour mieux endosser les habits de candidate à la présidentielle.
Et puis voilà qu’au détour d’une réponse aux questions de Gilles Bouleau, le présentateur du journal, sur les raisons de son nouveau slogan, Marine Le Pen a cité Raymond Aron : « L’Etat doit être respecté à l’extérieur et en paix à l’intérieur ». Stupeur du journaliste d’entendre la patronne du FN qui défend des positions souverainistes et anti-américaines citer le maître à penser des libéraux atlantistes.
Il n’a sans doute pas échappé aux conseillers de la future candidate à la présidentielle que Raymond Aron fut l’inspirateur de toute une génération allant de Valery Giscard d’Estaing à Raymond Barre, tout comme il nourrit la pensée de l’économiste ultra-libéral Nicolas Baverez chroniqueur au Point et habitué des colonnes du Figaro. Bref, qu’il est le penseur d’une droite libérale, éclairée et mondialiste.
D’une citation habilement glissée dans une interview attendue, les spins doctors du FN ont envoyé un message aux électeurs qui leur ont manqué lors des derniers scrutins, régionaux et départementaux, ceux de la droite libérale que le programme économique du FN effraie, pour le moins.
Habile ? Trop habile. Car le procédé est cousu de fil blanc. D’ailleurs il n’était qu’à prêter l’oreille au ton sur lequel Marine Le Pen a placé sa citation télécommandée pour entendre qu’elle sonnait un peu faux. Tout comme détonnaient les références à Jean Jaurès quand le parti d’extrême droite avait décidé d’envoyer des œillades aux électeurs de gauche.
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