Taubira s'explique sur l'étrange timing de sa démission

Pourquoi l’ancienne garde des Sceaux n’a-t-elle pas quitté le gouvernement plus tôt ? Pour ne pas satisfaire la droite, assure-t-elle, mais aussi parce qu’elle pensait qu’il était encore possible de faire changer d’avis François Hollande…

Christiane Taubira continue à dérouler son plan com’. Alors qu’elle publie ses Murmures à la jeunesse, un livre dans lequel elle étaie notamment son opposition à l’inscription de la déchéance de nationalité dans la Constitution, l’ex-garde des Sceaux en fait la promotion dans une longue interview au Monde ce mardi 2 février. L’occasion de donner sa version du calendrier de sa démission, minutieusement préparée.

Pourquoi, en effet, ne pas avoir claqué la porte dès le 23 décembre, lorsque Manuel Valls l’a désavouée en confirmant que l’extension de la déchéance de nationalité aux binationaux serait bien inscrite dans la Constitution ? D’abord, se justifie-t-elle, pour ne pas donner l’impression de céder à l’opposition qui demandait sa démission en boucle depuis son arrivée place Vendôme. « J’estime qu’on ne part pas dans le vacarme. Je ne voulais pas que le tumulte des événements brouille la lecture de mon départ, notamment qu’on le lie aux pressions de la droite« , explique Christiane Taubira.

L’ex-ministre concède aussi avoir cru que le texte pouvait encore être abandonné ou modifié : « Je pense qu’il y a eu une courte fenêtre pendant laquelle il était possible de prendre de la distance par rapport à ce que le président de la République a dit au Congrès. Mais j’ai cependant compris très vite que, sur l’essentiel, il n’y aurait pas de retour en arrière et que, puisque l’on touchait là au cœur même de l’idée républicaine du droit de la nationalité, ma place n’était plus au gouvernement. »

Toujours soucieuse d’entretenir une part de mystère, Christiane Taubira ne veut toutefois pas livrer le moment précis de sa décision, mais confirme qu’elle était prise depuis quelque temps déjà : « Ma décision formelle de partir est très antérieure à la publication du livre, même si je ne vous dirai pas la date précise. » Un détail a cependant fait douter les observateurs. Sur la quatrième de couverture de son livre, Christiane Taubira est toujours présentée comme garde des Sceaux. A l’en croire, il ne faut cependant pas voir dans cette mention le signe d’hésitations de dernière minute, mais la volonté de préserver le secret jusqu’à l’officialisation de son départ : « Dans mon rapport de loyauté totale à l’égard du président de la République, j’ai choisi de tenir mon éditeur dans l’ignorance en ne le prévenant pas que je ne serais plus garde des Sceaux au moment de la parution du livre ».

Alors que la droite argue de dans l’écriture de cet ouvrage pour prouver que Christiane Taubira avait délaissé son ministère, celle-ci balaie l’argument : « Le temps que je prends pour écrire ne regarde personne, sauf si l’on me démontre que je n’ai pas fait mon travail. Durant quarante-cinq mois, j’ai passé mes jours, mes nuits et mes week-ends à travailler. Ce reproche n’a aucun sens. »

Pour le reste, Christiane Taubira prend bien soin de répéter au Monde sa position sur la révision constitutionnelle voulue par le gouvernement : « J’espère que la déchéance de nationalité ne sera pas inscrite dans la Constitution. Oui, j’espère très sincèrement que la gauche n’aura pas à assumer une telle décision ». Son avis pèsera-t-il dans le débat parlementaire ? Réponse à partir de vendredi, à l’Assemblée nationale.

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