Présenté le 25 janvier en avant-première dans le cadre de la sélection française du festival Premiers Plans d’Angers, La Marcheuse de Naël Marandin (sortie le 3 février) propose une plongée saisissante dans l’univers des « échassières » chinoises du quartier de Belleville. Le réalisateur offre ainsi un film puissant et ambitieux dont l’évidente rigueur documentaire n’enlève rien, bien au contraire, à la maîtrise fictionnelle.
Loin de tout misérabilisme, Naël Marandin parvient à interroger les liens mystérieux qui entremêlent les transactions financières et l’énergie intime des désirs. Il donne chair, de façon subtile et souvent émouvante, à cette étrange graduation des relations économico-sexuelles où, de la passe sordide au contrat de mariage en passant par l’échange de bons procédés, chacun(e) joue sa survie et conquiert sa liberté. On saluera aussi le travail remarquable effectué par le directeur de la photographie, Colin Houben, dont les images, subtilement « salies », offrent à la fois rutilance, épaisseur et rugosité aux tableaux du film, tout en ménageant des séquences d’une infinie douceur (tel la scène du karaoké ou le petit théâtre improvisé d’ombres chinoises). En cette descente dans les bas-fonds de notre post-modernité, Naël Marandin aura donc réussi le tour de force d’éclairer de la plus belle façon possible une réalité contemporaine sur laquelle le cinéma français n’avait jamais osé s’aventurer.
* La Marcheuse, de Naël Marandin. Produit par Folamour Productions, Vito Films. Sortie le 3 février 2016.
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