Condamné pour "mise en danger" après avoir exfiltré une fillette de la "Jungle" de Calais

Ce Britannique de 49 ans avait tenté d’exfiltrer une fillette afghane de la « Jungle » de Calais vers l’Angleterre, où elle devait rejoindre sa famille. Jugé ce jeudi, il a écopé d’une amende de 1.000 euros avec sursis pour… « mise en danger de la vie d’autrui ».

Mille euros avec sursis pour « mise en danger de la vie d’autrui ». La décision du tribunal de Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais) à l’encontre de Robert Lawrie a surpris ce jeudi. Ce Britannique de 49 ans était jugé pour avoir tenté de transporter clandestinement une petite fille afghane de 4 ans depuis la « Jungle » de Calais vers l’Angleterre, où elle devait rejoindre sa famille. Pour ce faire, il avait caché la fillette dans le coffre de sa camionnette. Le procureur, dans son réquisitoire, a estimé sa condamnation nécessaire parce que « la fin ne justifie pas les moyens » et qu’aider une enfant ne justifie pas de « mettre sa vie en danger ». En revanche, l’homme a été relaxé de l’« aide au séjour illégal » qui lui était reprochée.

Initialement, ce père de 4 enfants était en effet poursuivi pour « avoir facilité, par aide directe ou indirecte, la circulation irrégulière d’un étranger en France ». Autrement dit, pour ce qui est communément appelé un « délit de solidarité », contre lequel des associations d’aide aux migrants se sont battues, jusqu’à ce qu’une loi vienne répondre à leurs attentes. La loi du 31 décembre 2012 exclut désormais de condamnation une personne ayant pour objectif d’« assurer des conditions de vie dignes et décentes » à un migrant ou d’en « préserver la dignité ou l’intégrité physique » et ce, de manière désintéressée.

Mais pour un grief similaire à celui qui était fait à Robert Lawrie, le tribunal de grande instance de Grasse avait condamné, le 18 décembre dernier (soit trois ans après la prumulgation de la loi mettant fin au délit de solidarité), une militante associative de 72 ans à 1.500 euros d’amende pour avoir « aidé au séjour une personne en situation irrégulière ». La septuagénaire avait transporté deux réfugiés érythréens dans sa voiture, de la gare de Nice jusqu’à celle d’Antibes. La décision avait suscité la colère des associations d’aide aux migrants, qui craignaient qu’elle ne fasse jurisprudence. Cela n’a pas été le cas, donc, ce jeudi à Boulogne.

Mais pour Claire Rodier, directrice du Groupe d’information et de soutien des immigrés (GISTI), contactée par Marianne, la poursuite-même de Robert Lawrie n’avait pas lieu d’être : « Il y a, à travers la poursuite des personnes solidaires, une attaque envers les étrangers, une portée symbolique« . « Les récentes poursuites, rappelle-t-elle, comme celle de Nice en décembre ou celle, avant, du prêtre de Saint-Etienne (poursuivi parce qu’il avait abrité dans une église des Africains sans papiers, ndlr), sont autant de régressions vis-à-vis de la loi de 2012″. Ainsi, « depuis 2014 à peu près », Claire Rodier se désole de « revoir des délits de solidarité ». Un regain qui, souligne-t-elle, « entre en contradiction avec le mouvement de l’opinion et de la classe politique, qui avaient manifesté à la fin de l’été de l’empathie pour les réfugiés ».

Pierre Henry, président de France terre d’asile (FTA), préfère quant à lui parler de « délit d’aide à la circulation d’une personne irrégulière ». Mais considère tout autant que cette mise en examen n’avait pas lieu d’être : « Cet homme n’a fait que vouloir remettre cet enfant à sa famille, sans en tirer le moindre avantage pécunier. Sans rémunération, il n’y a pas lieu de poursuites. Je peux comprendre qu’il y ait une enquête sur un trafic d’êtres humains, car les passeurs doivent être punis. Mais il n’y avait, à mon sens, aucune raison de juger cet homme, qui n’a fait que tenter de rapprocher les membres d’une famille ».

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