L’appel du président du consistoire israélite de Marseille à ne plus porter la kippa, en réaction à l’agression antisémite dont a été victime un enseignant juif, ne fait pas l’unanimité, loin de là. Que ce soit dans la communauté juive de France ou chez les responsables politiques.
Il voulait sûrement bien faire. Poussé par l’émoi suscité par l’agression de cet enseignant juif de Marseille, ce lundi, simplement parce qu’il portait une kippa. En réaction, le président du consistoire israélite de Marseille, Zvi Ammar a « conseillé à la communauté juive de [la ville], provisoirement, [de] ne pas porter la kippa ». A l’AFP, il a précisé sa pensée : « On est obligé de se cacher un petit peu (…). On ne va pas mettre un policier, un gendarme ou un militaire derrière chaque juif. » Se dissimuler donc, sorte d’instinct de survie, pour éviter d’autres agressions. Un appel qui n’a pas été repris par les porte-voix de la communauté juive, loin de là.
Roger Cukierman, le président du CRIF, a ainsi jugé qu’il s’agissait là d’une « attitude défaitiste, de renoncement« . Le grand rabbin de France, Haïm Korsia a, de son côté, lancé un appel de résistance : « Nous ne devons céder à rien, nous continuerons à porter la kippa ». Joël Mergui, président du consistoire central israélite de France, a quant à lui, fait dans le détournement de slogan politique : « Touche pas à ma kippa ! ».
Même tonalité chez les responsables politiques de gauche comme de droite. Christiane Taubira, Garde des Sceaux, a rappelé avec force que « nous devons réaffirmer, nous devons garantir au quotidien, partout sur le territoire, la liberté de chaque citoyen, sa liberté, y compris de vivre sa croyance » et que par conséquent les juifs de France devaient « bien entendu » pouvoir porter la kippa dans l’espace public. Brice Hortefeux, député européen LR et ancien ministre de l’Intérieur, au micro de RTL ce matin, était sur la même ligne : « Renoncer, c’est céder. Nous sommes dans une République laïque. Chacun a le droit d’exprimer sa conviction ». Un rapprochement entre Taubira et Hortefeux suffisamment rare pour le souligner. L’avocat Jean-Pierre Mignard, un proche de François Hollande, s’est fendu, lui, d’un message sur twitter : « A Marseille, habitants ou visiteurs, portons tous une kippa : la seule réponse acceptable ».
A Marseille, habitants ou visiteurs, portons tous une #kippa : la seule réponse acceptable
— Jean-Pierre Mignard (@jpmignard) 12 Janvier 2016
Interrogé ce matin sur BFM, Xavier Bertand, le nouveau président de la région grand Nord, s’est lui aussi inscrit dans ce mouvement : « Tout le monde sent bien pourquoi le président du consistoire de Marseille a pris cette décision, il a peur, il a peur pour les juifs, il a peur d’agression. Mais si on baisse la tête, si les juifs à Marseille renoncent à porter leur kippa, la France ne sera pas à la France. (…) C’est demain la même question pour des musulmans, pour des catholiques. » Tout en évitant de jeter la pierre à Zvi Ammar : « Mais c’est plus facile à dire pour quelqu’un ici que pour le représentant là-bas qui doit avoir peur, c’est pour ça que l’Etat doit être là. » Pour sa part, Najat Vallaud-Belkacem, au micro de Patrick Cohen sur France Inter a exprimé sa « surprise » : « Ça n’est surement pas le conseil que j’aurais donné à titre personnel ». La ministre de l’Education, a elle aussi reconnu que le président du consistoire de Marseille avait sans doute voulu « protéger les siens, ça part d’une bonne intention », tout en insistant sur le fait que « ce n’est pas ce qu’il faut envoyer comme message. La protection doit venir de l’Etat, des pouvoirs publics ».
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