Quand l'idée d'une primaire à gauche revient par la fenêtre

Une primaire à gauche ? On croyait l’idée abandonnée et pourtant, elle refait surface. Une réanimation inopinée, surtout agitée comme un moyen de pression par ceux qui la défendent.

On la croyait totalement enterrée. Définitivement enfouie. Et pourtant, l’idée d’une primaire à gauche refait surface au PS ainsi qu’au Front de gauche, conséquence collatérale de la proposition de François Hollande sur la déchéance de nationalité. C’est d’abord Jean-Patrick Gilles, député PS qui participa à la fronde socialiste, qui dégaine le 2 janvier, en guise de meilleurs vœux pour le locataire de l’Elysée, un message sur son compte Twitter dans lequel il rappelle que « le candidat à la présidence de la République est désigné aux travers de Primaires citoyennes ouvertes… Art 5.3.1 des statuts du PS ». Une douce attention que le président de la République a dû fortement apprécier. D’autant qu’à la gauche du PS, certains entretiennent volontairement le mystère, à l’image du député d’Indre-et-Loire, questionné par Le Parisien sur le sujet, qui tout en expliquant qu’« il est trop tôt pour le dire », souffle tout de même sur les braises en mettant dans la balance l’épineux débat sur la déchéance de la nationalité pour les binationaux nés français : « Si cela se tend, cela peut entraîner une dynamique en faveur de la primaire ». Même son de cloche du côté de Christian Paul, député socialiste et meneur de la fronde, interrogé par France info et qui laisse lui aussi planer le doute : « On peut dire qu’en 2016, tout est ouvert. Franchement, les fissures commencent à être profondes », résume-t-il.

« On ne peut plus compter sur Hollande pour représenter les valeurs de la gauche »Au Front de gauche également, où l’on essaye de panser les blessures des régionales, l’idée commence à faire son chemin, comme nous le confie un dirigeant communiste : « Nous sommes tous d’accord pour dire que l’enjeu de 2017, c’est bien d’avoir une organisation opérationnelle pour que soient représentées les idées de la gauche. On le voit avec la proposition de la déchéance de la nationalité, on ne peut plus compter sur Hollande pour représenter les valeurs de la gauche. Personnellement, je pense qu’il faut qu’on mette cette idée sur la table ». Une primaire qui pourrait attirer une partie des militants et élus socialistes particulièrement choqués par l’entêtement du Président de toucher à la Constitution, espère-t-on notamment au PCF. D’ailleurs, nous souffle-t-on, pour ces deux prochaines semaines, l’agenda de Pierre Laurent et de ses équipes sera principalement consacré à des rencontres informelles avec des frondeurs du PS, des écolos, des représentants du milieu associatif et des syndicalistes, avec en filigrane des discussions « sans tabous, pour voir si nous sommes d’accord sur le constat et avec l’idée de parler d’une candidature commune ».

Côté écolos de gauche, si quelques-uns y sont favorables comme Julien Bayou, le porte-parole d’EELV, ou Eva Joly qui a porté les couleurs écologistes à la présidentielle de 2012, pas sûr que l’idée fasse des petits. « La mécanique des primaires, on en a déjà fait les frais en 2011 avec le résultats que l’on connaît », résume un cadre d’EELV. D’autant qu’ils sont beaucoup à défendre, au sein de l’appareil, « une candidature écologiste autonome » avec, parmi les noms qui circulent, celui de Cécile Duflot ou même — plus surprenant — de Nicolas Hulot…

Pour l’heure, l’idée d’une primaire à gauche semble surtout utilisée de toute part comme un moyen de pression. Au sein du PS, démuni de toute influence, l’aile gauche agite le chiffon rouge de la primaire sous le nez de François Hollande, dans l’espoir qu’il abandonne sa proposition sur la déchéance de nationalité. Sauf que si le chef de l’Etat se réfère à ce que fut l’éphémère mouvement des frondeurs, il y a peu de chance qu’il décide de bouger. Côté communistes, c’est un bon moyen de calmer les ardeurs d’un Jean-Luc Mélenchon qui a déjà fait acte de candidature à plusieurs reprises pour 2017, au grand désespoir de l’allié PCF. Quant aux écologistes, ils paraissent de plus en plus motivés pour partir en solo en 2017.

Résultat, alors que la droite se met, bon gré mal gré, en ordre de bataille pour effacer l’affront de 2012, la gauche, elle, sous les coups de boutoir d’un François Hollande toujours plus tacticien, et après quelques tentatives de recomposition lors des départementales et régionales, semble plus déboussolée que jamais.

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