Déchéance de nationalité pour tous : "C'est le pire pour tous"

Empêtré dans le débat sur la déchéance de nationalité des binationaux, le PS ne sait plus comment se sortir de ce mauvais pas. Et cette nouvelle idée de « déchéance pour tous » n’a pas l’air de convaincre beaucoup plus.

Une pillule qui ne passe pas. François Hollande n’a pas vraiment fait un cadeau à ses petits camarades en s’entêtant à vouloir inscrire la déchéance de nationalité des binationaux dans la Constitution. Fort des sondages montrant qu’une large majorité de Français serait – pour le moment – favorable à cette mesure, le président de la République a foncé tête baissée. Une véritable bombe incendiaire qui n’est pas prêt de s’éteindre.

Hier, lors du bureau national du PS, Jean-Christophe Cambadélis, le patron des socialistes, était « visiblement dans l’embarras », selon un participant. Pas étonnant puisque loin d’être favorable à cette mesure, il ne veut pas pour autant donner l’impression d’être en opposition au gouvernement. Un rôle d’équilibriste résumé par un élu : « Camba, qui voit bien que la contestation au sein du parti va bien au-delà de l’aile gauche, se retrouve le cul entre deux chaises ». Résultat, aucune position officielle du PS malgré un BN qui a duré, longtemps, très longtemps. « Je suis arrivé à 18h30. Je m’étais inscrit pour faire une intervention mais à 20h30, je n’avais toujours pas pu prendre la parole », témoigne un membre du bureau. Un Jean-Christophe Cambadélis « très embarrasé », qui a préféré reporter au 18 janvier pour décider d’une éventuelle position du parti. Traduction par un socialiste présent hier : « Il ne sait pas comment se sortir de ce mauvais pas. Il ne veut pas avoir à trancher avant que le gouvernement ne se positionne ». 

D’autant qu’à la surprise de tous, lors des débats, des socialistes comme Olivier Faure ou David Assouline, « pourtant des loyalistes », s’étonne un membre de l’aile gauche, sont montés au créneau pour exprimer eux-aussi leur gêne. Une réunion des contraires surpenantes : « Lorsque l’on était sur des débats économiques, ils se taisaient. Mais là, on touche à des questions de principe comme l’a rappelé Assouline dans son intervention », analyse avec satisfaction un frondeur. 

Dans ce contexte, la déchéance de nationalité pour tous qui sanctionnerait tous les Français et non uniquement les binationaux, idée préconisée par de plus en plus de socialistes au nom du principe d’égalité, pourrait-elle être une porte de sortie comme pense le croire Bruno Le Roux, le président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale ?

tweet à archiver: la déchéance pour tous réunit « plus largement » voire « très largement » les députés PS, assure Le Roux

— laure bretton (@laurebretton) 5 Janvier 2016

Pas vraiment selon ce ténor de l’aile gauche du PS : « La déchéance pour tous, c’est scandaleux. C’est quoi l’idée ? Etre le premier pays à déroger à des principes fondamentaux en créant des apatrides. Non. La déchéance de nationalité, c’est le pire pour tous ». Un sentiment semble-t-il partagé par d’autres socialistes et que résume ce tweet de Marie-Pierre de la Gontrie, qui s’était portée candidate pour briguer la présidence du conseil régional d’Ile-de-France : « Comment en est-on arrivé à s’enthousiasmer pour la création d’apatrides… Que nous arrive-t-il ? ». 

Comment en est on arrivé à s enthousiasmer pour la création d’apatrides….que nous arrive t il ?….

— mpdelagontrie (@mpdelagontrie) 5 Janvier 2016

« C’est complétement fou que la déchéance pour tous apparaisse comme une porte de sortie », se désespère un autre participant du bureau national de lundi. Jérôme Guedj, ancien président du conseil général de l’Essonne, lui, regrette que « le symbolique écrase tout. Au lieu de parler de mesures pragmatiques pour lutter efficacement contre le terrorisme, on se questionne sur la déchéance de nationalité qui de l’aveu de tous n’a aucune efficacité sur le terrain. Quid de ce qu’il y a dans le pacte de sécurité annoncé ? Voilà de quoi nous devons parler », estime-t-il.

Même regret pour Marie-Noëlle Lienemann, sénatrice socialiste, qui réclame une commission d’enquête parlementaire sur l’après-13 novembre : « Jusqu’à présent, nous savons qu’il y a eu des failles et pourtant nous ne posons aucune réflexion sur ces aspects pratiques de la lutte antiterrorisme. Sur la refondation des services de renseignements, sur l’augmentation des effectifs de police etc… Sommes-nous prêts à faire face en cas de nouvelle attaque ? », questionne ainsi l’élu. 

Mais pour avoir des réponses à ces questions, force est de constater, qu’il faudra repasser.

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