Dans son procès intenté par un établissement scolaire privé portant le nom d’Écoles musulmanes de Montréal, c’est le droit de toute la société à la liberté d’expression que Djemila Benhabib défendra.
Le 26 septembre s’ouvrira le procès de Djemila Benhabib au palais de justice de Montréal, procès intenté par un établissement scolaire privé portant le nom d’Écoles musulmanes de Montréal (EMMS). Quelle qu’en soit l’issue, ce procès interpelle de nombreux citoyens sur la place accordée à la liberté d’expression, à l’égard notamment des dogmes et des comportements religieux, au Québec, en 2016.
Ce procès est cruellement symbolique. D’un côté, des religieux qui encouragent au hijab dès le plus jeune âge dans un pays démocratique. De l’autre une femme libre, militante de l’égalité des sexes et de la laïcité, originaire d’un pays qui a été laminé par l’islamisme. Deux camps, deux visions de la femme, deux conceptions du monde. Beaucoup de féministes, universitaires engagées dans le débat intellectuel et politique, ayant accès à la parole publique, s’expriment très régulièrement dans les médias. Dans ce procès, leur mutisme n’en est que plus révélateur.
Cela fait des années que, sur ces thématiques corrélées les unes aux autres – du blasphème à la laïcité, de la liberté de conscience et d’expression à l’égalité des sexes – des féministes envoient des signaux particulièrement dangereux. Où étaient-elles ces derniers mois ? Au nom de l’inclusion et de l’ouverture inconditionnelle à l’Autre, elles défendaient le droit au burkini, caressant les militantes du voile et autres « féministes islamiques » dans le sens du poil. Elles défendaient, par exemple, le droit de la pakistanaise Zunera Ishaq à prêter le serment de citoyenneté canadienne le visage dissimulé conformément à la tradition pachtoune. Le paroxysme de l’incivilité.
Les islamistes cultivent l’art de se présenter comme des victimes. Et quoi de plus sensationnel qu’une victime « issue de la diversité » ? Mais ces féministes oseront-elles se déplacer jusqu’au palais de justice pour écouter (et entendre) ce que ces « victimes » ont à dire ? Iront-elles se frotter au contact de la réalité ? Viendront-elles écouter les doléances de religieuses et de religieux adorant voiler les filles dès leur plus jeune âge ? Ce hijab dont on nous ressasse qu’il est un « vêtement comme les autres » des deux côtés de l’Atlantique. Un vêtement comme les autres… dès lors que ce sont des musulmanes qui le portent. Car on n’a jamais vu les enfants de ces féministes blanches et privilégiées porter le hijab. Il y a même de grandes chances qu’elles ne le portent jamais.
Le lundi 12 septembre au matin, j’ai croisé la députée de gauche radicale Manon Massé près de l’université. Je ne lui ai pas demandé si le parti qu’elle représente à l’Assemblée nationale viendrait soutenir Djemila Benhabib dans son combat. Car je connais d’avance la réponse. Ces personnalités n’ont que les mots « liberté », « égalité » et « justice » à la bouche. Mais dans les faits, quand un procès injuste, conduit par les champions de l’inégalité des sexes, met en cause notre droit collectif à la liberté d’expression, il n’y a plus personne. Cette attitude est d’autant plus scandaleuse que l’ascension fulgurante du fondamentalisme musulman est une réalité planétaire qui accrédite les thèses que développe Djemila Benhabib depuis de nombreuses années.
Déjà, lorsque le premier ministre du Canada célèbre l’Aïd, accompagné de députées portant le voile islamique, ce bout de tissu comme les autres, dans une mosquée séparant minutieusement femmes et hommes, cela ne suscite aucune réaction réelle de la part des féministes. La Fédération des femmes du Québec (FFQ), toujours aussi courageuse, « n’a pas souhaité se prononcer sur le sujet ». Quant à Justin Trudeau, peut-être égorgera-t-il le mouton lui-même en 2017 devant une foule inclusive et intersectionnelle en délire.
À ce féminisme halāl qui n’a jamais œuvré qu’à la promotion de l’islam, c’est-à-dire d’un particularisme religieux, Djemila Benhabib oppose un féminisme résolument harām, tourné vers l’universel. Dans ce procès, c’est le droit de toute la société à la liberté d’expression qu’elle défendra. Sachons la soutenir et l’en remercier.
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