Viré pour avoir voulu diffuser "Merci patron !" dans sa boîte : les prud'hommes confirment le licenciement

Pour avoir fait la promotion du documentaire de François Ruffin, « Merci patron ! », un ingénieur, prestataire de services en mission chez Renault, a été licencié pour faute grave. Il avait également dévoilé les raisons de sa mise à pied dans un entretien à « Fakir ». Les prud’hommes ont rendu leur décision ce 26 août : ils confirment le licenciement.

>> Cet article a été publié une première fois le 30 juin. Nous le republions à l’occasion du jugement des prud’hommes attendu ce vendredi 26 août.

Recommander un film à des collègues de travail peut coûter cher. Henri, 35 ans, ingénieur prestataire de services à Eurodecision, en mission chez Renault, au Technocentre de Guyancourt dans les Yvelines, l’a appris à ses dépens. Le 15 mars dernier, depuis son ordinateur et sa messagerie personnels, il a envoyé un courriel aux syndicats du site du constructeur automobile pour faire l’éloge de Merci Patron !, le documentaire à succès de François Ruffin, fondateur du journal satirique Fakir.

Le film, une plongée dans l’histoire d’un couple d’anciens ouvriers du groupe de luxe LVMH, endettés et dont l’usine a été délocalisée en Pologne, revient sur le combat de ces derniers pour faire reconnaître le préjudice qu’ils ont subi auprès de Bernard Arnault, PDGG de LVMH. Merci patron ! permet de « redonner aux gens l’espoir que la lutte est utile », écrit alors Henri aux syndicats du Technocentre. Etant par ailleurs bénévole pour Fakir, il propose aux syndicats d’organiser eux-mêmes une projection du film.

Las, quelques jours après, le 31 mars, Henri reçoit un premier avertissement, son patron à Eurodecision lui reprochant d’avoir pris contact avec les syndicats du site de Guyancourt, après avoir été personnellement alerté de l’échange « d’un message électronique à caractère politique » par le responsable de la sous-traitance de Renault. L’ingénieur, qui est mis à pied à titre conservatoire, décide de relater cet entretien auprès de Fakir, sans citer de noms : « C’est Renault qui l’a appelé directement. Je ne sais pas comment ils ont eu connaissance du mail« , y explique-t-il notamment.

Les prud’hommes confirment le limogeage

Le 21 avril, une lettre de licenciement pour faute grave est alors notifiée à Henri. Saisi en référé, le tribunal des prud’hommes a rendu sa décision ce 26 août : il confirme le licenciement sur la forme.

Pour son avocate, qui réclamait 50.000 euros à titre d’indemnité provisionnelle pour le préjudice subi, Henri n’a pas commis de faute en s’exprimant ainsi auprès de Fakir. Il n’aurait fait que « dénoncer une infration pénale : la violation du droit syndical« . Pour l’avocate d’Eurodecision, au contraire, la faute grave est caractérisée car l’ex-employé « a violé son obligation de loyauté et de bonne foi » vis-à-vis de son employeur. Les prud’hommes sont allés dans son sens.

Une question demeure cependant : Renault surveille-t-il bien les mails de ses syndicats, comme l’a affirmé le patron d’Eurodecision à Henry ? Qui a informé Renault de la correspondance électronique entre l’ingénieur et les syndicats du Technocentre ? La CGT-Renault assure qu’il n’y a pas eu d’espionnage des mails des syndicalistes. Ce sont des délégués CFE-CGC du Technocentre qui se seraient « plaints » auprès de la direction d’avoir été contactés sur leur boîte mail professionnelle par l’ingénieur…

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