Son nom avait été évoqué par François Hollande le 3 août pour présider la Fondation pour les oeuvres de l’islam de France. Ce lundi 15 août, dans « le Parisien », l’ancien candidat à la présidentielle de 2002 affirme qu’il ne se « dérobera pas » et avance sa feuille de route. S’adressant aux musulmans de France « en cette période difficile », il recommande de recourir à « la raison naturelle »…
Il devait donner sa réponse à la rentrée. Sa réflexion a été plus rapide que prévue. Dans un entretien accordé au Parisien ce lundi 15 août, Jean-Pierre Chevènement accepte la mission confiée par François Hollande : relancer la Fondation pour les oeuvres de l’islam de France créée en 2005 par Dominique de Villepin mais qui n’a jamais vraiment fonctionné. Chevènement revèle d’ailleurs au passage que l’idée n’est pas sorti subitement du chapeau de Hollande, contrairement à l’impression que l’annonce avait pu donner : c’est Bernard Cazeneuve qui, dès le 26 avril, lui a adressé un courrier pour lui proposer la présidence de cette fondation.
Cette mission, donc, Jean-Pierre Chevènement a décidé de l’accepter, sauf cas de force majeure :
« Cette mission est tellement d’intérêt public qu’aucun responsable ne peut s’y dérober. Je ne m’y déroberai donc pas sauf si ma nomination devait entraîner des problèmes insolubles qui me forceraient à me retirer. »
A l’annonce du choix de Hollande, beaucoup avaient en effet regretté que ce ne soit pas une personnalité musulmane qui prenne la tête de cette Fondation. Même la ministre Laurence Rossignol avait dressé un portrait bien différent de la personne idéale à ses yeux : une femme de « culture musulmane« .
Des critiques que balaye le principal intéressé. Il souligne qu’on lui propose bien « la présidence de la Fondation pour les oeuvres de l’islam de France [qui] a une vocation d’intérêt général, et non de l’association cultuelle qui y sera adossée. Le futur président de la Fondation ne sera pas chargé de promouvoir l’islam. (…) Je n’entends nullement m’immiscer dans la sphère du religieux. »
De quoi poser les premiers jalons de cette future structure. Et d’en définir aussi les principales missions : Chevènement évoque en priorité « la formation profane des imams », c’est à dire l’enseignement de « ce qu’est la citoyenneté française, le cas échéant la langue française, les principes généraux du droit, en tout cas ceux régissant les rapports entre le culte musulman et les pouvoirs publics », puis la promotion « des projets cultuels » pour mieux faire connaître « la civilisation musulmane ». Il envisage aussi « la création d’un institut de recherche – profane – en islamologie. »
Jean-Pierre Chevènement livre également son opinion sur les sujets brûlants du moment. Quid du financement étranger pour la construction de mosquées ? L’ancien candidat à la présidentielle privilégie le financement français et, a minima, la plus grande transparence : « L’islam de France, y compris dans sa version théologique où je n’ai pas à intervenir, doit pouvoir se développer avec des fonds français ou, en tout cas, qu’un mécanisme de transparence soit institué en l’absence de tout « fléchage » de la part des donateurs ». Chevènement tient toutefois à rappeler le travail qui a déjà été entrepris dans ce domaine :
« Il ne faut pas négliger ce qui a déjà été fait avec des fonds français, y compris avec le concours des collectivités locales dans les limites permises par la loi : il y a aujourd’hui 2 500 mosquées en France. Le temps de l' »islam des caves et des garages » est révolu.«
Quid d’une taxe halal ? « il faut d’abord que les musulmans s’entendent sur la certification de ce qui est hallal. Et la décision leur appartient. »
Concernant les polémiques autour du burkini et plus largement autour du port du voile à l’université ou les repas différenciés dans les cantines, Chevènement estime que modifier la loi n’est nullement nécessaire car « légalement, les choses me paraissent assez claire« . Il « conseille » en revanche « la discrétion » :
« Le conseil que je donne dans cette période difficile – comme le recteur de Bordeaux – est celui de la discrétion.
Les musulmans, comme tous les citoyens français, doivent pouvoir pratiquer leur culte en toute liberté. Mais il faut aussi qu’ils comprennent que, dans l’espace public où se définit l’intérêt général, tous les citoyens doivent faire l’effort de recourir à la « raison naturelle ». Un principe que le prophète recommande quarante-quatre fois, selon l’islamologue Jacques Berque, dans le Coran. »
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