Le gouvernement éthiopien massacre ses opposants désarmés

Depuis quelques jours, les Oromos – groupe ethnique le plus important en Ethiopie – ont repris le chemin de la contestation, refusant une salve d’expropriation des terres agricoles. Le gouvernement a donné son feu vert à toutes les formes de répression. Amnesty International a dénombré une centaine de morts lors d’affrontements le week-end dernier…

Pendant que la bataille d’Alep fait rage, focalisant l’attention de tous les médias, quelque part en Afrique, un gouvernement massacre allègrement des opposants désarmés. Cela se passe en Ethiopie, deuxième pays le plus peuplé du continent, doté d’une croissance « à la chinoise » et d’un régime bénéficiant de toutes les indulgences internationales.

Depuis la chute lointaine du Négus Hailé Sélassié, puis la fin de l’effroyable dictature « socialiste » de Mengistu Haile Mariam, au gré d’élections plus ou moins transparentes et truquées, le pays est dirigé par les caciques du Front démocratique révolutionnaire éthiopien (FDRPE), essentiellement issus de la région du Tigré. Et c’est bien là tout le problème. Alors qu’ils représentent moins de 10 % des 90 millions d’Ethiopiens, les Tigréens ont accaparé l’appareil d’Etat, revendiquant une légitimité acquise grâce à leur rôle décisif dans la guérilla contre le génocidaire Mengistu.

Pour l’opposition, loin de mener une politique conforme aux exigences d’une République fédérale, le FDRPE n’aurait de cesse de favoriser les siens au détriment des régions les plus peuplées dominées par les Oromos, le groupe ethnique le plus important. En novembre 2015 déjà, un vaste projet immobilier aux forts relents de corruption, le Master Plan censé agrandir Addis-Abeba, capitale surpeuplée, avait suscité la colère de paysans menacés d’expropriation. Après deux mois de manifestations et près de 400 morts selon l’ONG Human Rights Watch (HRW), 173 selon le pouvoir, ce dernier avait apparemment cédé à la pression de la rue.

Le Premier ministre donne son feu vert à toutes les formes de répression

Mêmes causes, mêmes effets : dans plusieurs villes et bourgades, depuis quelques jours les Oromos ont à nouveau pris le chemin de la contestation, refusant une énième salve d’expropriation des terres agricoles. Lors du dernier week-end (6 au 7 août), dans plusieurs bourgades de l’Oromia (centre et ouest) et l’Amhara (nord), l’armée a tiré. Au moins une centaine de morts, si l’on en croit Amnesty International. Le Premier ministre Haile Mariam Dessalegn a donné son feu vert à toutes les formes de répression, estimant  « l’unité du pays » menacée par des « mouvements sécessionnistes ». Sans que pour l’heure la « communauté internationale » ne s’en émeuve plus que cela.

Addis-Abeba présente, il est vrai, l’insigne qualité d’être un partenaire fiable et déterminé dans la lutte contre les islamistes somaliens shebabs et plus largement les menées djihadistes dans toute la région. A preuve : lors de sa dernière et brève tournée africaine, en juillet 2015, Barack Obama s’était arrêté à Addis-Abeba, s’accordant un des discours très articulés dont il a le secret dans le hall Nelson Mandela du siège de l’Union africaine (UA). En conclusion, il y tançait ceux des dirigeants du continent qui justifient leur maintien au pouvoir au prétexte qu’ils « seraient les seuls capables d’empêcher (cette) nation d’éclater.» Pour l’heure Washington ne s’est pas encore prononcé sur les massacres en cours.

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