François Hollande a accordé ce jeudi 30 juin un long entretien au journal « Les Echos » qui marque, toujours sans le dire, son entrée en campagne. Brexit, Europe, économie, gauche : le président sortant balaye large et dessine son plan de bataille pour l’élection présidentielle de 2017.
Acte I, scène 2. Après son premier discours de campagne, le 3 mai dernier, au théâtre du Rond-Point lors d’un colloque organisé par la fondation Jean Jaurès, François Hollande s’offre ce jeudi 30 juin son premier entretien de campagne. Ceux qui douteraient encore de la détermination du chef de l’Etat à se présenter à l’élection présidentielle de 2017, n’ont qu’à se plonger dans Les Echos de ce jour.
Dans un entretien fleuve accordé au journal économique, François Hollande balaye large, proposant sa feuille de route aux Français pour 2017 et plus. Derrière chaque thème, la volonté de consolider un peu plus sa stature de commandeur, de seul candidat légitime à gauche et qui, dans cette période d’instabilité – Europe vacillante, montée des extrêmes, situation géopolitique incertaine – est à même de résister à la vague de la droite et tenir la barre du bateau France. A l’image de Mariano Rajoy, le chef de file de la droite espagnole qui est sorti vainqueur des dernières élections générales, Hollande a bien compris que la prime à la continuité, en ces temps agités, peut s’avérer rentable. Et se place tranquillement, selon une stratégie en quatre points.
Pour François Hollande, la tournure des événements post-Brexit est une aubaine. Face aux errances des Britanniques ayant porté le « Leave » et qui semblent aujourd’hui totalement dépassés, le président interrogé sur l’organisation d’un tel référendum en France, dégaine : « Pourquoi organiser un tel tumulte et une telle confrontation, si ce n’est pour quitter l’Union européenne ? Les mensonges, les simplifications, les outrances et même les violences que l’on a constatées pendant la campagne référendaire au Royaume-Uni ne suffisent donc pas à ces apprentis sorciers ? Il ne s’agit évidemment pas de se méfier du peuple. Mais le rendez-vous démocratique sur l’Europe, il aura lieu en France lors de la prochaine présidentielle. Le Front national, qui voulait jusqu’à maintenant abandonner l’euro, annonce désormais qu’il fera campagne pour que notre pays quitte l’Union européenne, comme le Royaume-Uni aujourd’hui. Et bien en 2017 ce débat devra être assumé. Et l’expérience britannique aura valeur d’exemple ou plutôt de contre-exemple. »
Et d’opposer son volontarisme politique, comme s’il avait repris les rênes de l’UE : « Au Conseil européen, j’ai demandé que l’Europe se concentre sur la sécurité, le contrôle des frontières extérieures, la lutte contre le terrorisme, la défense de notre continent, car les citoyens veulent d’abord être protégés. Nous devons également bâtir une Europe puissante autour de la croissance, des investissements et de l’emploi dont la jeunesse doit être la première bénéficiaire. Sur la zone euro je veux engager notamment avec l’Allemagne une harmonisation sociale et fiscale. Enfin, le fonctionnement de l’Europe doit changer sans qu’il soit nécessaire de bouleverser les traités. C’est la condition pour que l’Europe retrouve confiance dans son avenir et suscite à nouveau l’espérance. »
Autre volet sensible du moment, la loi Travail. L’occasion pour Hollande de reprendre le flambeau de l’autorité à son Premier ministre : « Il n’y a aucune incertitude », elle passera coûte que coûte, avec un grand coup de 49-3 s’il le faut. La modification de la disposition sur l’inversion de la hiérarchie des normes ? » L’article 2 sera maintenu dans sa rédaction actuelle ». Même fermeté affichée sur le dossier Notre-Dame-des-Landes : « Les travaux s’engageront prochainement dans le respect du droit et la ZAD sera donc évacuée ».
Qui dit campagne, dit nécessité de se démarquer de ses rivaux qui s’affronteront dans la primaire de la droite : « L’originalité n’est pas leur marque de fabrique. A croire qu’ils ne sont que la reproduction en plus brutal de programmes déjà présentés à l’occasion de scrutins parfois lointains. Mais ils me paraissent surtout inadaptés à la situation de notre pays et éminemment dangereux pour notre modèle social (…) Je trouve qu’il y a beaucoup d’inconséquences et peu de justice. Les programmes des candidats à la primaire, c’est plus de dépenses dans tous les domaines et moins d’impôts dans tous les autres. »
Le chef de l’Etat le sait, pour espérer présenter sa candidature aux Français, il devra passer par l’étape primaire et rassembler largement. Et face à l’argument de la « grande trahison » alimenté par l’aile gauche du PS et la gauche de la gauche, il est dorénavant décidé à rendre coups pour coups : « Il y a une gauche de gouvernement. Celle-là, dans toute sa diversité, elle doit se rassembler. C’est son devoir ; sinon elle laissera la place à la droite ou à l’extrême droite. Et puis il y a une gauche de contestation. Elle a toujours existé. Elle conteste un système et ne pose pas réellement la question de l’exercice du pouvoir (…) La trahison, c’eut été de laisser le pays dans l’état où je l’ai trouvé. Je m’en expliquerai devant les Français autant que nécessaire. »
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