Brexit hard ou Brexit soft : tout est encore possible !

Malgré le vote populaire des Britanniques en faveur du Brexit, rien n’est clair concernant la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne. Les négociations seront décisives et pourraient vider de sa substance ce retrait de l’UE.

Les Britanniques ont choisi le Brexit, soit. Reste maintenant à déterminer en quoi il consiste. En dépit du vote clair du peuple britannique à 51,9% en faveur de la sortie de l’Union européenne ce jeudi 23 juin, la suite des opérations n’a jamais paru aussi floue.

« Cela dépendra des négociations. » Apprêtez-vous à entendre souvent cette phrase dans les prochaines semaines. Elle est pour l’heure la seule réponse qui vaille aux interrogations que tout brave Européen est à même de se poser : pourra-t-on toujours circuler librement au Royaume-Uni ? Les vêtements importés d’Angleterre qu’on achète en ligne seront-ils plus chers ? Et bien sûr, la question qui brûle les lèvres de tous les fans de foot : nos stars françaises vont-elle devoir quitter la Premier League ?

Une chose est sûre : le Royaume-Uni va enclencher dans les prochains mois, vraisemblablement en octobre, la procédure de retrait de l’Union européenne, en vertu de l’article 50 du Traité de Lisbonne. A compter de cette date s’ouvrira une période de deux ans durant laquelle le Royaume-Uni et l’Union européenne négocieront les modalités de ce départ.

Contrairement à ce que le vote de ce jeudi 23 juin paraît supposer, il est possible que ces négociations débouchent… sur un statut quo, ou presque. « La situation est complètement inédite et les contours de la négociation sont tout sauf pré-déterminés« , confirme Thierry Chopin à Marianne, chercheur associé au Centre de recherches internationales (CERI) de Sciences Po. « Un Brexit hard est envisageable comme un Brexit soft.« 

Pourra-t-on toujours circuler librement au Royaume-Uni ?

Principe de libre circulation des personnes oblige, les Français peuvent aujourd’hui rester autant de temps qu’ils le souhaitent au Royaume-Uni, y travailler, s’y établir. Les étrangers hors-Union européenne doivent au contraire disposer d’un permis de travail, accordé discrétionnairement par l’administration britannique. Ce privilège européen est clairement menacé par le Brexit d’autant plus que « l’exemption des règles de la liberté de circulation a constitué un thème de campagne fort«  pour les partisans du Leave, indique Thierry Chopin.

Conséquence logique : les ressortissants européens qui habitent le Royaume-Uni ne pourront plus rester autant qu’ils le souhaitent et seront susceptibles d’être expulsés à la demande du gouvernement britannique. Parmi ces personnes, les nombreuses stars françaises qui évoluent dans le championnat anglais de football représentent un bon exemple. Si le Royaume-Uni campe sur ses positions lors des négociations, les joueurs européens devront respecter les critères drastiques posés par la Fédération anglaise de football pour obtenir un permis de travail, à savoir être international de son pays et avoir disputé au moins 50% des matchs de son équipe nationale sur les deux dernières années. Autant dire qu’avec cette règle, Dimitri Payet et N’Golo Kanté, les deux meilleurs joueurs français depuis le début de l’Euro, seraient invités à quitter le Royaume-Uni.

Les conditions strictes d’accueil pourraient cependant exclure quelques pays minutieusement choisis. En cas de départ non négocié de l’Union européenne, le Royaume-Uni pourrait se tourner vers ses partenaires les plus proches pour établir des accords de circulation bilatéraux. Rien n’empêcherait le Royaume-Uni et la France de se mettre d’accord sur la liberté de circulation et d’établissement réciproque des ressortissants des deux pays, soit le maintien de la situation actuelle… mais pas pour n’importe quel voisin.

Les produits anglais seront-ils plus chers ?

Un épisode d’hystérie collective dont Twitter a le secret illustre bien cette interrogation sur le prix des produits anglais. Ce vendredi 24 juin, de nombreux clients de la marque anglaise de vêtements Asos, qui livre à domicile ses produits, ont fait part de leur vive inquiétude sur le réseau social. « Si le Royaume-Uni quitte l’Union européenne, quand on va commander chez Asos, on va avoir des frais de douane ?« , a notamment demandé une internaute, reprenant le questionnement de nombreuses autres personnes. Le service client d’Asos a répondu dans la foulée qu’il n’en savait fichtre rien : « On n’a pas plus d’infos pour le moment à ce sujet« .

Cet aveu d’ignorance totale est compréhensible, puisque rien n’est prévu à ce stade. Pour Thierry Chopin, les intérêts économiques anglais devraient pousser le Pemier ministre qui négociera à essayer d’obtenir le maintien du Royaume-Uni dans le marché intérieur : « Les Britanniques voudront sans doute demander à participer au marché intérieur et à avoir un droit de regard sur le fonctionnement de ce marché« . Ce qui reviendrait à vouloir sortir de l’UE en n’en gardant que les avantages ! Il y a toutefois peu de chances pour que les dirigeants acceptent une telle proposition, sauf à vouloir à tout prix maintenir un lien avec le Royaume-Uni. « La question primordiale qui va se poser aux dirigeants européens, c’est : ‘A quelles conditions est-on prêt à garder des liens avec le Royaume-Uni ?’ « , analyse le chercheur.

Sur ce point, le président de la commission européenne Jean-Claude Juncker a livré un élement de réponse en déclarant mercredi 22 juin que « dehors, c’est dehors » pour le Royaume-Uni. Une manière de sous-entendre qu’aucun accord préférentiel ne pourra être signé avec Londres et d’exclure donc la possibilité d’un Brexit soft. Cette position tiendra-t-elle ? « Cela dépendra des négociations », évidemment.

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