C’est la nouvelle polémique à la mode : qui serait l’inspirateur de la loi Travail ?
C’est la nouvelle polémique à la mode : qui serait l’inspirateur de la loi Travail ? Le gouvernement affirme qu’il s’agit bien de lui quand des syndicalistes estiment qu’il s’agit d’une des réformes « structurelles » voulues par les institutions européennes. Pendant ce temps, l’échec de la négociation Unedic est bien un accroc aux engagements de Paris !
Deux éminents confrères se sont attaqués à la question : Martine Orange sur Mediapart et Jean Quatremer dans Libération. Tous deux ont retrouvé moult déclarations de la Commission européennes mêlant injonctions et recommandations aux pays membres dont Paris. Ne serait-ce que ce : « La loi Travail, c’est le minimum de ce qu’il faut faire », jeté aux journalistes français par Jean-Claude Juncker le 31 mai. On retrouve aussi les « recommandations pays » (les réformes que le Conseil européen, sur proposition de la Commission, souhaite voir adopter par le pays concerné) de 2015 prescrivant de permettre aux entreprises de déroger aux accords de branches, etc…
Côté français, on revendique hautement l’indépendance vis-à-vis de Bruxelles. C’est une ligne de conduite générale depuis l’élection de François Hollande, de toujours mettre en avant l’autonomie du pouvoir français vis-à-vis de l’Union européenne pour ne pas encourir le procès en « inféodation ». Et il y a aussi le débat interne au pays. Marianne a ainsi révélé comment le Medef avait circonvenu Manuel Valls en janvier lors du forum de Davos, afin qu’il inscrive dans la loi El Khomri les dispositions auxquelles il tenait le plus : le plafonnement des indemnités en cas de licenciement abusif et la redéfinition du licenciement économique.
Mediapart a fait un récit tout à fait édifiant des relations entre la ministre du Travail et Manuel Valls. Mais, au fond, entre Paris et Bruxelles, il s’agit un du débat sur la poule et l’œuf. Car les « recommandations » de Bruxelles sont toujours décidées après une concertation avec les ministres concernés. On dit même à Bruxelles que ce sont les gouvernements des pays concernés qui les écrivent. Pourquoi pas ? La réalité des institutions européennes d’aujourd’hui, c’est la fusion du personnel politique national et européen. Le cas le plus emblématique est celui de Pierre Moscovici, passé du ministère de l’Economie français au poste de commissaire aux Affaires économiques à Bruxelles. L’homme qui écrit les « recommandations pays » est donc le même que celui qui devait les appliquer autrefois, le tout sans vrai contrôle parlementaire ni à Strasbourg, ni à Paris. L’interessé, lucide, reconnaît d’ailleurs dans Libération que cette gouvernance « pose un problème de légitimité démocratique ».
Entre la poule et l’œuf, les médias ont négligé de considérer l’enjeu « européen » de l’échec de la négociation Unedic, le 15 juin. Dans le programme de réforme de 2015, le gouvernement français s’était engagé auprès de l’Union européenne à ce que les partenaires sociaux réalisent une réforme du « marché du travail ». Le genre « structurel », qui cible les chômeurs toujours suspects de se tourner les pouces, qu’adorent les hauts fonctionnaires européens mais aussi leurs confrères français. Voici ce que disait le PNR 2015, visé par Matignon :
« Les partenaires sociaux, qui ont la responsabilité de la négociation de la convention d’assurance chômage, débuteront les négociations de la future Convention d’ici début 2016. La convention devra être agréée et s’appliquer au plus tard le 1er juillet 2016. Les objectifs de mise en oeuvre de règles d’indemnisation plus incitatives au retour à l’emploi et l’assurance de la consolidation financière du régime seront au coeur des objectifs de la future convention d’assurance chômage. La consolidation financière du régime et la sécurisation des parcours professionnels se traduiront par de nouvelles économies à partir de 2016 qui devraient atteindre, combinées avec les mesures de la convention de 2014, un effort total de 2 Md€/an à l’horizon 2017. »
Pour l’heure, plus de négociation, et le gouvernement semble décidé à reconduire la convention actuelle pour quelques mois, afin que le système d’assurance chômage français ne s’écroule pas. Donc pas de réduction supplémentaire du déficit … Mais là, ce n’est pas grave, ce n’est pas la CGT qui bloque, c’est le Medef…
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