Laurence Parisot en guerre contre les écrivains

Laurence Parisot ne sait absolument pas de quoi elle parle. Anyways ! Elle s’exprime tout de même.

Ce dont on se doutait depuis quelques années vient d’être prouvé il y a quelques jours : Laurence Parisot ne sait absolument pas de quoi elle parle. Anyways ! Elle s’exprime tout de même. On lui devait déjà cette belle maxime : «La vie, la santé, l’amour sont précaires : pourquoi le travail échapperait à cette loi ?» Mais c’était en 2005. Comme c’est loin ! Heureusement, son talent n’a pas tari. L’ex-présidente du Medef vient de le prouver dans une tribune de Libération. (Oui, Libération offre des tribunes à Laurence Parisot.) Plafonner les salaires des patrons du CAC 40 ? Oh ! Vous n’y pensez pas ! Parisot s’indigna sur une pleine page, expliquant que ce serait trop injuste, puisque cette mesure ne s’appliquerait pas à d’autres Français, qui gagnent pourtant beaucoup d’argent.

Des exemples ? Tenez-vous bien : «Un artiste qui gagne 20 millions par an et qui utilise tout au long de l’année sans vergogne les services d’intermittents ne serait pas concerné ; un écrivain à succès qui empoche 1,8 million de droits d’auteur et qui ne fait travailler personne ne serait pas concerné.» On passera vite sur l’attaque, presque banale, du régime des intermittents. On ne s’attardera même pas sur les chiffres lancés par l’ex-patronne des patrons. Combien d’artistes français empochent 20 millions d’euros par an ? Combien d’écrivains gagnent 1,8 million d’euros par livre ? Parisot ne semble pas informée de la paupérisation des intellectuels français. Mais le pire est qu’elle feint d’ignorer comment fonctionne le marché du livre.

Parisot feint d’ignorer la paupérisation des intellectuels

Aidons-la à comprendre notre époque, puisque c’est aussi la sienne. «Un écrivain à succès […] ne fait travailler personne» ? Pas exactement. Nous avons posé la question à divers éditeurs : si un écrivain touche 1,8 million d’euros (chiffre absurde et démesuré), c’est que son livre (qui coûte 20 €) a été vendu à 900 000 exemplaires… L’éditeur empoche alors 4 millions de bénéfices. On donne 2,7 millions à l’imprimeur ; 2,2 millions aux distributeurs ; et l’ensemble des libraires se divise 6,3 millions de bénéfices. Pas mal pour quelqu’un «qui ne fait travailler personne» !

Si ces gains vous semblent gigantesques, sachez qu’ils doivent paraître astronomiques à Laurence Parisot, puisque sa biographie, écrite en 2008 par Fanny Guinochet, s’est vendue à 2 702 exemplaires (soyons précis), faisant ainsi gagner à la journaliste la modeste somme de 5 400 €… Comme quoi, litterae non dant panem (traduction moderne : «écrire, ça ne paie pas le loyer.») Le titre de cette biographie à l’insuccès immérité ? Laurence Parisot, une femme en guerre. Beau titre, franchement ; mais c’était incomplet. Soyons heureux : nous savons enfin à qui Laurence Parisot a déclaré la guerre.

 

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