Alors que se tient ce lundi 30 mai à Matignon un conseil national de la lutte contre le travail illégal et la fraude au détachement, on apprend que le nombre de travailleurs détachés enregistrés en France a crû de 25% en 2015, ce qui les porte à plus de 286.000 personnes.
Au programme à Matignon ce lundi 30 mai : l’épineux sujet des travailleurs détachés, source de dumping social et de fraudes. Et le chantier est immense : le nombre de travailleurs détachés enregistrés en France n’a jamais été aussi élevé. Selon des données provisoires transmises à la Commission nationale de lutte contre le travail illégal (CNLTI) et publiées samedi 28 mai par l’AFP, ils sont 286.025 à avoir été déclarés à l’administration française en 2015, soit une progression de 25% par rapport à l’année précédente.
La forte hausse du nombre de travailleurs détachés enregistrés en France, qui a décuplé en dix ans (ils étaient 26.466 en 2005), est rendue publique alors que le gouvernement tente de modifier la législation européenne. Le conseil national contre le travail illégal qui se réunit ce lundi 30 mai à Matignon devrait réitérer les demandes que Myriam El Khomri avait portées en février à la Commission européenne. La ministre du Travail avait alors demandé l’inscription dans une directive du principe : « à travail égal, salaire égal sur un même lieu de travail ». Un mois plus tard, cette formulation avait été reprise à son compte par la commissaire européenne à l’Emploi Marianne Thyssen.
Actuellement, un employeur doit rémunérer un travailleur détaché au moins au salaire minimum imposé par le pays d’accueil, mais n’est pas contraint par les règles européennes de tenir compte des autres avantages salariaux dont bénéficient ses collègues, comme les primes, indemnités ou tickets-restaurant. Avec l’application de ce principe, les travailleurs détachés seraient couverts par les lois et les conventions collectives des pays d’accueil.
46.816 travailleurs polonais en FranceLa Commission européenne a répondu favorablement en mars à l’appel de Paris, en retenant d’autres propositions françaises comme la limitation à deux ans de la durée du détachement, contre 30 mois aujourd’hui, ou l’arrêt du recours en cascade de détachements des salariés intérimaires. Mais Bruxelles ne compte pas pour autant revenir sur l’épineuse question des cotisations sociales. L’employeur continuera à payer les cotisations du salarié détaché selon la législation de son pays d’origine, et non celle du pays d’accueil. De cette façon, un travailleur venu par exemple d’un pays de l’Est coûte bien moins cher à un employeur français. La Pologne est le principal pays d’origine des salariés détachés en France avec 46.816 travailleurs.
Les règles concernant le paiement des cotisations sociales n’étant pas prêtes d’évoluer, le ministère du Travail renforce son arsenal répressif contre la fraude au détachement. Depuis l’été 2015, l’inspection du travail a intensifié ses contrôles, passant de 600 interventions en juin 2015 à 1.504 en mars 2016. Plus de trois quarts ont été effectuées dans le BTP (76%). Des contrôles de plus en plus nombreux qui « montrent une augmentation du nombre de fraudes », précise le gouvernement. Et d’expliquer que la forte hausse du nombre de travailleurs détachés en 2015 est « probablement » due aux « contrôles de plus en plus fréquents » et aux « sanctions nouvelles » qui ont poussé certains employeurs à déclarer des « détachements précédemment non déclarés »… En somme, les 286.000 travailleurs détachés enregistrés en 2015 auraient été déjà présents les années précédentes… mais tous n’auraient pas été déclarés.
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