A l'image de Michel Thierry Atangana, la France ne doit pas abandonner ses enfants

Cela fait aujourd’hui deux ans que notre concitoyen Michel Thierry Atangana a été libéré. Et deux ans que, malgré sa rencontre avec le président de la République, François Hollande, et l’intervention de l’ONU, il n’a toujours pas été réhabilité. Cet homme ordinaire, pris dans une histoire extraordinaire, et que la France n’a pas su aider, ne peut toujours pas mener une vie normale.

Ce qui est arrivé à Michel Thierry Atangana aurait pu arriver à chacun d’entre nous.

En 1994, comme des milliers de Français, il choisit de s’expatrier. Il part s’établir avec sa famille au Cameroun, en tant qu’expert financier, pour aider à la construction du réseau routier du pays. Très vite, il se retrouve à la tête d’un fonds important, qui gère les investissements de grandes sociétés multinationales. Tout lui sourit.

Et puis, en 1997, en sortant de la messe avec sa famille, il est arrêté, sans aucune explication. Il apprendra plus tard qu’il est accusé, à tort, de soutenir un adversaire du président en place, Paul Biya, dans la course à l’élection présidentielle du Cameroun. Tous ses biens sont saisis. L’argent des entreprises, lui, disparaît. On ne le retrouvera jamais.

17 ans de tortures physiques et psychologiques

Et c’est le début de dix-sept longues années de souffrance. De tortures physiques et psychologiques infligées dans une pièce de 7m2, sans fenêtre, située dans les sous-sols du secrétariat d’Etat à la Défense. Michel Thierry Atangana n’est pas prisonnier. Il est otage. Un prisonnier a des droits. Il n’en a aucun. Un prisonnier sait pourquoi il a été arrêté. Lui l’ignore. Un prisonnier a des contacts avec l’extérieur, il voit la lumière du jour. Michel Thierry Atangana n’a aucun contact avec l’extérieur. Dans sa cellule, il peut à peine étendre le bras.

Sans l’intervention du Département d’Etat américain, d’Amnesty International et de l’ONU, qui a mené quatre ans d’enquête avant d’exiger sa libération, Michel Thierry Atangana n’aurait probablement pas recouvré la liberté, le 24 février 2014. Malade, il serait probablement mort en prison.

Qu’a fait la France pour le faire libérer ? Rien. Ou presque. Il a fallu attendre quinze ans, quinze longues années, avant qu’elle se rappelle l’existence de son ressortissant. Et qu’elle exige d’avoir un droit de visite.

Pourquoi refuser sa réhabilitation et son indemnisation complète ?

Pourquoi la France a-t-elle abandonné un de ses enfants pendant aussi longtemps ? Pourquoi refuse-t-elle, aujourd’hui, d’appliquer la décision du groupe de travail sur la détention arbitraire de l’ONU, qui demande la réhabilitation et l’indemnisation complète de Michel Thierry Atangana ? Qui demande que des sanctions soient prises contre les responsables ? C’est la question que nous nous posons.

Comme Michel Thierry Atangana, un nombre croissant de Français détenus à l’étranger, comme récemment Serge Lazarevic, Marc Féret, ou Thierry Dol – tous anciens otages français -, se disent abandonnés par la France à leur retour. Marc Féret et Thierry Dol ont même porté plainte, convaincus que leur pays n’avait pas fait le nécessaire pour les libérer.

Comme Michel Thierry Atangana, on estime que 20 % des 2 558 Français actuellement détenus à l’étranger, dont au moins 518 sont détenus sans cause connue, ne bénéficient d’aucun soutien de la part de leur consulat. Le cas de Michel Thierry Atangana, exceptionnel par sa longévité, est symbolique. En tant que parlementaires, en tant que citoyens, nous souhaitons comprendre pourquoi certains de nos ressortissants ne bénéficient pas du même support diplomatique et judiciaire que d’autres.

Nous nous alarmons de cette rupture de l’égalité républicaine. Nous appelons donc d’une voix unie, forte et pleine de gravité, à l’ouverture d’une mission d’information parlementaire sur le traitement des Français détenus à l’étranger ou pris en otages, afin de clarifier les pratiques de notre protection diplomatique. Et de faire en sorte que chaque Français puisse pleinement bénéficier du soutien de la France.

Comme le disait Romain Gary : «Le patriotisme c’est l’amour des siens. Le nationalisme, c’est la haine des autres

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