La droite la plus mal habillée du monde

Ce n’est pas tant que le galurin en feutrine de Tonton nous fasse rêver, que les pompes laquées de Roland Dumas excitent la femelle lubrique qui sommeille en chaque électeur, ou que les costards bâillant sur les fesses de Flanby le Magnifique ne nous fassent pas vomir. Mais, franchement, les leaders de droite, un peu de tenue, quoi !

Les habits du pouvoir ont toujours été un outil stratégique de premier ordre. Autrefois, ils marquaient le souci d’affirmer sa puissance, en appuyant l’autorité royale sur moult colifichets. Aujourd’hui, ils signifient l’extrême inverse : faire peuple, à l’aide de conseillers en communication lissant l’image de leurs poulains pour les plateaux télé. A droite, c’est tout un festival de ringardise délibérée. Exit l’élégance classique inculquée aux jeunes loups de la bourgeoisie par leurs mamans sur les fonts baptismaux des beaux quartiers. La crise fait rage, le prolétariat gronde, les gueux frappent aux portes de l’Europe. Pour le gandin acquis au néolibéralisme, il s’agit désormais de faire croire à ses administrés qu’il vit comme eux, même s’il vient de Neuilly et qu’eux s’entassent à Trappes. Depuis que Balladur a perdu la présidentielle faute d’avoir compris son époque, les costumes trois pièces prennent la poussière au placard et l’on s’affuble de vestes les plus mal coupées possible, histoire de faire oublier qu’on a les moyens d’en porter de superbes. Ce qui n’empêche pas de cacher une montre valant un an de salaire de smicard sous une manche en polyester…

Ne prenons pourtant pas les enfants du bon Dieu pour des imbéciles, ni pour des ploucs. Le chroniqueur de mode Marc Beaugé racontait il y a quelques années dans le Monde l’histoire de ce député communiste à qui ses électeurs avaient offert une cravate, honteux que leur représentant soit si mal fagoté à l’Assemblée. Question de fierté ! Que devraient dire les nouveaux électeurs de droite, condamnés à voir leurs élus perpétuer à dessein les erreurs stylistiques d’un étudiant en école de commerce, essayant une veste pour la première fois de sa vie ! Coupes mal ajustées, matières synthétiques, couleurs sinistres… Surtout, pas une pochette, pas une couleur vive. Quand nos élus se font remarquer, c’est en disant une connerie, jamais en portant une belle veste en tweed… On admirait jadis l’honnête homme ; l’époque est à l’ennui (dit normcore), en politique comme en art. Considérer le peuple des électeurs comme une tripotée de beaufs sirotant des bières tièdes en jogging sur les parkings déserts de supermarché de province n’est pas seulement une faute de goût, c’est une faute morale. Heureusement, un mensonge rattrape toujours son menteur. Démonstration dans les urnes l’année prochaine !

LE COMMERCIAL À GOURMETTE : icône, Nicolas Sarkozy

Les politiques aussi font leur crise de la cinquantaine. A 25 ans, Nicolas Sarkozy posait dans les magazines, fringué en bon bourgeois de Neuilly. A 50 et quelques, il se trimbale dans des tenues à la limite du vulgaire, pour marquer son envie de rupture avec l’élégance. Jean trop grand et veste noire, costume étriqué, cravate sans couleur. Ne manque plus que la gourmette et des cheveux mi-longs pour se reconvertir en vendeur de cigarettes électroniques.

Cours de rattrapage : il y a pourtant plus simple quand on veut faire smart sans être vieillot ! Porter une cravate sombre mais colorée, avec un fond bordeaux et une fine rayure bleue par exemple, une très belle chemise blanche parfaitement coupée, un costume anthracite (pas noir, surtout), et pourquoi pas une pochette blanche pliée en carré, à la Cary Grant. Et, pour couronner le tout, une jolie montre au prix raisonnable, qui ne vaudra pas dix ans de reproches dans les journaux. Un style très new-yorkais, sobre sans être sinistre, moderne et tenu.

 

 

LE TRADI FLIPPÉ : icône, Laurent Wauquiez

Issu d’une famille aisée avant de devenir l’élu d’un territoire rural, puis de défiler dans tous les cortèges contre le mariage pour tous, défenseur enfin des valeurs de la droite chrétienne avant de prendre la région Auvergne-Rhône-Alpes, Laurent Wauquiez a un besoin fou d’authenticité. Cela explique sûrement pourquoi l’énarque porte depuis des années une grosse parka rouge, plus adaptée semble-t-il au Grand Nord canadien qu’aux salons feutrés de la politique française…

Cours de rattrapage : siégeant désormais à l’hôtel de région dans la très bourgeoise ville de Lyon, Laurent pourrait enfin se détendre et adapter sa garde-robe. S’il aime tant le rouge, qu’il fasse le choix d’un pantalon de velours, très chic anglais, à compléter d’une petite veste en laine. Et pour les jours où sa parka lui manquera, Aigle fait de supers imperméables un tantinet plus discrets, bien utiles pour visiter les circonscriptions rurales en vue de sa réélection.

 

 

L’ASSIETTE ANGLAISE : icône, François Fillon

François Fillon est un cas à part. Dernier peut-être à assumer un statut social qui lui dicte d’aimer les blazers, il tend néanmoins ces derniers temps à renier ses premières amours, primaire oblige. L’ex-Premier ministre avait pourtant été très remarqué il y a quelques années, rendant visite au président de la République avec une veste forestière de chez Arnys, belle maison parisienne aujourd’hui disparue. On le sait aussi porteur de chaussettes Gammarelli, snobisme très gentleman pour une institution romaine qui fournit le pape.

Cours de rattrapage : avec un tel bagage, difficile de passer du coq à l’âne, et de se mettre à porter des petits costumes serrés façon minet The Kooples. Il ne reste à Fillon qu’à rester droit dans ses bottes, en choisissant par exemple les superbes cravates de l’entreprise allemande Shibumi, des pantalons à imprimé prince de Galles et des chemises bleues. Une tenue d’aristo de campagne qui lui siéra à merveille.

 

 

L’ÉPOUVANTAIL À MOINEAUX : icône, Hervé Mariton

L’homme a longtemps roulé pour Villepin, avant de se rendre compte qu’il ne partageait quasiment rien avec son mentor. Depuis, il squatte la salle des Quatre-Colonnes dans des costumes improbables, et tente de s’inventer un style singulier. Handicap de poids dans cette course au destin, ses tenues font régulièrement la joie des observateurs, qui notent un réel penchant pour la couleur, ce qui change un peu, mais avec une inspiration venue en droite ligne des années 70.

Cours de rattrapage : et si Hervé Mariton n’était pas l’échappé de la naphtaline qu’on prétend, mais un cryptodandy, sorte d’Oscar Wilde de la droite conservatrice ? Mœurs à part, bien entendu. S’il osait, il lui serait facile d’adapter ses tenues, en portant par exemple un superbe costume gris à carreaux bleus, pour un style un peu plus flamboyant. Avec une paire de mocassins et une cravate en grenadine, l’effet serait du dernier chic, façon vieux député conservateur britannique. Ce qui ne serait certainement pas pour lui déplaire.

 

LA PROF DE TECHNO DÉBORDÉE : icône, Valérie Pécresse

Lorsqu’on dirige la région Ile-de-France, est-il raisonnable d’affectionner encore et toujours des petites tenues de prof de lycée ou de maman des Hauts-de-Seine, bon chic bon genre mais pas trop ? Le carré blondinet, le cabas mou rempli de Michoko pour le quatre-heures des enfants et la parka de Mme Tout-le-Monde, ça ne vous pose pas trop comme femme de pouvoir, alliant l’autorité et le charme…

Cours de rattrapage : Valérie dirige à présent la région de la haute couture, du parfum et du glamour. Il s’agirait de se mettre à la page et ne pas passer pour une pauvresse quand elle rencontrera Karl Lagerfeld afin de s’enquérir de ses attentes en tant que Francilien. La panoplie parfaite ce printemps pour se faire aimer des créateurs de mode comme des bobos ? Sans contrarier sa nature de fille toute simple, Valou peut opter pour une robe légère un peu bohème, très canal Saint-Martin, et des sandales à talon à la mode. Au bras, un petit sac en cuir modeste ; les Parisiennes n’aiment pas trop se compliquer la silhouette.

 

LA BOURGE PASHMINA : icône, Christine Lagarde

Est-ce pour perpétuer une certaine image du chic français à Washington ? Par nostalgie de la mère patrie et du marché, le dimanche matin dans le XVIe arrondissement ? Avec ses foulards et ses broches soleil, la patronne du FMI a perpétuellement l’air de sortir de la messe. D’une tristesse à mourir, ce style dadame, toujours en vogue dans certains quartiers de Paris, Versailles, Lyon ou Bordeaux, ne peut émoustiller dans la vraie vie que quelques z-y-va mal intentionnés ou le gros œdipien à tendances masochistes.

Cours de rattrapage : un peu de discrétion teintée d’élégance ne saurait nuire à ce type de militantes upper class, emperlouzées ou chanelisées à outrance. Sans tomber dans le look Barbara Bush, une panoplie de grand-mère chic – petit pantalon bleu, veste de tailleur couleur pastel et baskets immaculées – serait du meilleur effet devant ses copains banquiers.

 

LE PSYCHORIGIDE DE LA CRAVATE : icône, Manuel Valls

On a beaucoup moqué le sens du style très personnel du Premier ministre de la République. Ce dernier s’est d’ailleurs amélioré, certainement sur les conseils de ses proches. Mais il reste une piste non étudiée à ce jour. Et si les costumes clairs, les couleurs zarbi et les accords ton sur ton du beau Manu étaient les symptômes d’un mal qui le ronge depuis plus de dix ans déjà : cacher une nature d’histrion contrarié ? De charmeur mal aimé ? Prisonnier d’un parti qu’il exècre, l’homme guindé aurait ainsi cherché, comme les otages envoient des indices, à suggérer sa vraie personnalité aux Français…

Cours de rattrapage : si comme nous le pensons, en bon libéral-libertaire, Manuel Valls est un séducteur latin refoulé, roulant les cheveux au vent dans une décapotable sur la côte amalfitaine, nous lui recommandons sans hésiter le costume crème et la chemise ouverte sur son torse viril, le passeport dans la poche et le large sourire du mec perpétuellement en vacances…

 

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