Fraude fiscale : le cas Cahuzac transmis au Conseil constitutionnel

La Cour de cassation a décidé ce mercredi 30 mars de transmettre aux juges constitutionnels la QPC posée par Jérôme Cahuzac dans le cadre de l’affaire de fraude fiscale qui avait provoqué la chute du ministre du Budget en 2013.

Le paiement d’une amende au fisc peut-il exempter de poursuites judiciaires ? C’est la question que se posera le Conseil constitutionnel après que la Cour de cassation a décidé ce mercredi 30 mars de lui transmettre la Question prioritaire de constitutionnalité (QPC) posée par Jérôme Cahuzac. L’ancien ministre menteur a en effet saisi les juges de la rue de Montpensier, estimant que l’amende qu’il a versée à Bercy en règlement de l’affaire de fraude fiscale qui l’avait poussé à quitter le gouvernement Ayrault le 19 mars 2013 devrait lui épargner de nouvelles poursuites au plan pénal.

Avec cette QPC, que le « filtrage » de la Cour de cassation a transmis au Conseil Constitutionnel, Jérôme Cahuzac s’attaque au code même des impôts. Il souhaite en effet que les juges invalident certains de ses articles, qui autorisent « à l’encontre de la même personne et en raison des mêmes faits, le cumul de procédures ou de sanctions pénales et fiscales ». Le code général des impôts prévoit en matière de répression pénale une peine de cinq ans d’emprisonnement et 75.000 euros d’amende pour le délit de fraude fiscale simple, et jusqu’à un million d’euros d’amende dans certains cas, notamment lorsqu’un compte ouvert dans un Etat étranger a été utilisé sous certaines conditions.

« Une amende (n’est pas) de même nature qu’une peine de prison »

Pour l’avocat de Jérôme Cahuzac et de son ex-épouse, tous deux poursuivis pour fraude fiscale et blanchiment par le tribunal correctionnel de Paris, une double sanction serait donc inconstitutionnelle. Et porterait atteinte au principe juridique français (« non bis in idem ») selon lequel un même fait ne peut être doublement sanctionné. L’ancien ministre en charge de la lutte contre l’évasion fiscale ayant déjà « accepté un redressement fiscal et une majoration de 80% », d’un montant de plus de 2,3 millions d’euros. Un argument que balaie l’avocat général Denis Mondon, qui souligne qu’« une amende (n’est pas) de même nature qu’une peine de prison ». Et d’expliquer que « les sanctions fiscales protègent les intérêts financiers de l’Etat », tandis que « les sanctions pénales protègent la citoyenneté, la nation ».

Il reviendra donc aux « Sages » de se prononcer, dans les trois prochains mois, sur cette question de droit. La jurisprudence constitutionnelle sur le sujet est des plus incertaines. La Cour de cassation avait quant à elle retenu, dans un arrêt de 2011, que « le principe selon lequel une même personne ne peut pas être punie deux fois pour le même fait ne reçoit pas application au cas de cumul entre sanctions pénales et sanctions administratives »… En attendant la décision du Conseil, le début du procès pour blanchiment de Jérôme Cahuzac et de son ex-épouse est fixé au 5 septembre.

Powered by WPeMatico

This Post Has 0 Comments

Leave A Reply