Invité du « Grand rendez-vous » d’Europe 1, dimanche 27 mars, le ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports, Patrick Kanner, a repris la petite musique entendue depuis les attentats de Bruxelles et selon laquelle il existerait de nombreux « Molenbeek » en France. Le ministre a aussitôt assuré que le gouvernement prenait « le taureau par les cornes dans ces quartiers ».
La situation est alarmante mais, n’ayez crainte, nous faisons ce qu’il faut. Tel était le message délivré par Patrick Kanner ce 27 mars au matin. Mais c’est surtout la première partie de ce message du ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports, qui risque d’être retenue : “Il y a aujourd’hui en France, on le sait, une centaine de quartiers en France qui présentent des similitudes potentielles avec ce qu’il s’est passé à Molenbeek« , a-t-il estimé au micro d’Europe 1.
Dans la seconde partie du message, et tout essayant de ne pas apparaître comme un donneur de leçons à l’image de son camarade Michel Sapin, Patrick Kanner assure qu’à la différence des Belges, la France saurait gérer la situation :
« Mais il y a une différence énorme aussi – et je suis vraiment de tout cœur avec nos amis belges et je n’ai pas de leçon à donner à la Belgique ou à ses pouvoirs publics, mais il est vrai que nous prenons le taureau par les cornes dans ces quartiers.“
Sur le constat, Patrick Kanner met en avant l’isolement social et la crise qui touche ces quartiers. “Molenbeek, c’est une concentration énorme de pauvreté et de chômage, c’est un système ultra communautariste, c’est un système mafieux, avec une économie souterraine. C’est un système où les services publics ont quasiment disparu, c’est un système où les élus ont baissé les bras.“
Plaque tournante du djihadisme en Europe, le quartier de Molenbeek fait ainsi figure de caricature. « Quand je suis arrivé à Molenbeek, la police était une catastrophe. Je suis de gauche, très ouvert, mais ces quartiers populaires ont droit à la sécurité. Je me suis battu pour qu’il n’y ait pas de zones de non-droit », rembobinait ainsi Philippe Moureaux, l’ancien bourgmestre de Molenbeek, sur France 2, tout en admettant des erreurs: « Je ne vais pas dire que je suis un homme parfait. J’ai peut-être été trop prudent en matière de mixité sociale. »
Depuis les attentats du 22 mars, plusieurs responsables politiques ont exprimé leur crainte de voir se transposer le modèle de Molenbeek en France. Parmi eux, Eric Ciotti, député LR des Alpes-Maritimes: « Nous devons, enfin, avoir la lucidité et le courage de dire que beaucoup de Molenbeek se sont installés, hélas, au cœur même de la France et que nos dirigeants en portent la même responsabilité.«
Mêmes déclarations, ou presque, du côté de Bruno Le Maire, candidat à la primaire de la droite en 2016 : « Il y a l’équivalent de Molenbeek en France, dans certains quartiers », jurait-il au Monde. « Beaucoup de citoyens français de confession musulmane crient au secours contre cet islam politique, au secours contre l’affaiblissement de la République, et nous demandent de réagir ». Mais cette critique n’est pas l’apanage de la droite.
À gauche, Malek Boutih a appelé à mettre « sous tutelle » les « Molenbeek qu’il y a chez nous »: « Il faut couper le robinet aux djihadistes », a déclaré le député PS de l’Essonne sur RTL. « Après chaque attentat, il y a plus de candidats au djihad. Les gosses qui y vont ne sont pas des décérébrés mais ils sont convaincus »
Trappes, Grigny, le quartier du Mirail à Toulouse… Les mêmes lieux reviennent souvent dans la bouche de ceux qui comparent les deux situations. Sur RTL, Djamel Guessoum, directeur général d’une association de réinsertion en Seine-Saint-Denis (Arsej), constatait le 25 mars qu’« il existe des quartiers où, effectivement, il y a une réelle chape de plomb avec des personnes qui gèrent le quartier et qui sont très radicalisées. Ceci dit, c’est en extrême minorité ». Et il suffit d’une minorité pour passer à l’acte.
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