En 2016, Nicolas Sarkozy va à la messe, rend visite au pape et s’exprime dans des médias chrétiens. Autant de tentatives de se rabibocher avec un électorat chez lequel il n’est plus tellement en odeur de sainteté.
Nicolas Sarkozy ne s’est visiblement pas confessé au pape François lorsqu’il lui a rendu visite au Vatican, lundi 21 mars. « On a entendu des éclats de rire derrière la porte », raconte à Marianne un membre de la petite délégation qui accompagnait l’ancien chef de l’Etat. Un tête-à-tête d’un peu plus d’une demi-heure que Nicolas Sarkozy a obtenu après plusieurs mois d’insistance, selon Paris Match. C’est l’un de ses anciens conseillers élyséens, Bruno Joubert, ambassadeur de France près le Saint-Siège entre 2012 et 2015, qui a finalement permis de décrocher le sésame. La visite était strictement privée, même si l’un de ses proches nous assure que « le protocole a été le même que pour un chef d’Etat ». Peut-être, mais le rendez-vous ne figurait pas à l’agenda officiel du pape, et aucun photographe n’était là pour immortaliser la poignée de main. Dans l’entourage de Nicolas Sarkozy, on affirme que cette discrétion était volontaire : « Nous avons voulu que ce soit très sobre en terme de communication. »
Pourtant, on ne peut s’empêcher de penser que l’ancien président aurait apprécié de se faire tirer le portrait aux côtés de ce pape très populaire. Un cliché qui aurait complété d’autres signaux adressés aux catholiques en cette semaine sainte qui précède Pâques. Jeudi 24 mars, Nicolas Sarkozy a ainsi participé à l’émission Face aux chrétiens. Et ce week-end, il adressera comme l’an dernier un message aux chrétiens pour Pâques.
Retrouvez-moi demain sur @KTOTV, @radionotredame, @radiorcf et dans @LaCroix -NS #FaceAuxChrétiens pic.twitter.com/s6fYp8cyiw
— Nicolas Sarkozy (@NicolasSarkozy) March 23, 2016
L’entourage de Nicolas Sarkozy dément toute volonté de bâtir une séquence spécifiquement destinée à séduire l’opinion catholique. Il n’empêche : depuis le début de l’année, une opération reconquête semble engagée. En janvier, l’ex de l’Elysée avait assisté à une messe de réparation à l’église Saint-Louis de Fontainebleau, ravagée par un incendie criminel quelques jours plus tôt. Il faut dire qu’il cherchait, lui aussi, à réparer un grave péché aux yeux de la Manif pour tous : son revirement sur le mariage des homosexuels, qu’il ne souhaite finalement plus abroger. « Ça fait des dégâts dans ce milieu, non seulement sur le fond, mais aussi pour son image », analyse Jérôme Fourquet, directeur du département Opinion et stratégies d’entreprise de l’Ifop. « Quand il ajoutait ‘ça ne coûte pas très cher’ en promettant l’abrogation de la loi Taubira, c’était quand même de l’opportunisme politique en direct. »
Aux régionales de décembre, les catholiques ont davantage voté FN que l’ensemble des Français.
Mais entre Sarkozy et les catholiques, c’est compliqué depuis plus longtemps que ça. « C’est une histoire de séduction-répulsion, avec des hauts et des bas, un peu comme dans un couple », explique Samuel Pruvot, journaliste au magazine Famille chrétienne et auteur d’un livre sur Nicolas Sarkozy à paraître le 1er avril*. Le premier couac date du lendemain de son accession à l’Elysée : « En 2007, Nicolas Sarkozy annonce qu’il ira se recueillir dans un monastère après son élection, et le monastère se transforme en yacht de Vincent Bolloré. Les catholiques n’ont pas oublié ça. » Le retournement de veste sur le mariage pour tous pourrait devenir un nouveau sparadrap du capitaine Haddock. « Tous les catholiques français ne suivent pas le noyau dur minoritaire qui réclame une abrogation pure et simple, mais un revirement aussi brutal laissera des traces », prédit Samuel Pruvot.
Mais Nicolas Sarkozy n’a pas renoncé à son opération séduction. Alors il investit d’autres terrains. Ainsi, il ne manque jamais une occasion d’exalter les « racines chrétiennes » de la France et, à en croire l’un de ses conseillers, il n’a pas renoncé à son concept assez nébuleux de « laïcité positive ». Si le patron du parti Les Républicains tente coûte que coûte de recoller les morceaux, c’est parce qu’il sait qu’une désaffection des cathos pourrait lui coûter cher dans les urnes. Il avait pu compter sur eux en 2007 et, dans une moindre mesure, en 2012. Mais aux régionales de décembre, la digue a sauté. Les catholiques ont davantage voté FN que l’ensemble des Français, et parmi les catholiques pratiquants réguliers qui se sont rendus aux urnes, un sur quatre a choisi le parti de Marine Le Pen, selon une étude Ifop pour Pèlerin. Preuve que pour le nouveau saint Nicolas, la voie de la rédemption risque fort de ressembler à un chemin de croix.
* Le mystère Sarkozy, éditions du Rocher
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