"Je me suis trouvé seul" : Sarkozy règle ses comptes avec les patrons

Ce mercredi, au lendemain de l’arrêt de la cour de cassation validant les écoutes qui le mettent en difficulté dans l’affaire Azibert, Nicolas Sarkozy a planché comme si de rien n’était devant la Fondation Concorde. Un public stratégique pour la primaire à qui l’ancien Président a joué la partition de l’amour vache.

Il a préféré la loi Tepa à l’abrogation des 35 heures, le bouclier fiscal à la suppression de l’ISF … L’arc de séduction qui reliait en 2007 Nicolas Sarkozy et les patrons s’est brisé au fil de son quinquennat. Aujourd’hui, la méfiance prédomine dans les relations qu’entretient le patron des Républicains avec ceux qui forment pourtant l’un des segments électoraux stratégiques de la primaire de novembre 2016.

Après Alain Juppé et François Fillon et avant Bruno Le Maire, Nicolas Sarkozy planchait ce mercredi matin devant la Fondation Concorde, un think tank ultra-libéral qui organise des petits déjeuners de l’alternance, très courus des chefs d’entreprises. Affaibli par des sondages qui le montrent distancé par son principal rival Alain Juppé, percuté par l’arrêt de la cour de cassation qui valide les écoutes Azibert et ouvre la voie à un procès en correctionnelle, l’ancien président a choisi à son habitude l’attaque comme meilleure défense.

Pendant l’heure et demie qu’a duré ce grand oral, l’ex de l’Elysée a donc multiplié les piques. A l’adresse des sondeurs d’abord. Courroucé d’avoir été accueilli par une étude de l’Ifop montrant notamment que 50 % des électeurs potentiels de la primaire ne voient pas l’ancien président comme un bon candidat pour 2017. « Les sondages, c’est nombriliste alors que notre pays est en train de sombrer », balaie-t-il, osant même : «  Si on devait gouverner un pays avec les sondages, on ne gouvernerait rien du tout. » L’ancien président a décidément la mémoire courte, lui qui a été si friand de ces études pendant son quinquennat, y engloutissant plusieurs millions d’euros, distribués sans appels d’offres. Le point de départ de l’affaire dite des sondages de l’Elysée, dans laquelle l’institut Ipsos vient d’être mis en examen.

« On est partis 500 millions et à la fin il n’en reste qu’un seul. »

Mais derrière son pupitre, Nicolas Sarkozy a déjà trouvé une autre cible, son auditoire du jour qu’il accuse de ne pas l’avoir assez soutenu pendant son quinquennat et surtout au moment de la présidentielle 2012.  « C’était l’inverse du Cid, raille-t-il. On est partis 500 millions et à la fin, il n’en reste qu’un seul ». Plus tard, il ajoute :

« J’aurais aimé sentir une pression positive derrière moi au moment du service minimum, du bouclier fiscal, de l’autonomie des universités, de la suppression des droits de succession… Le bouclier fiscal, ceux qui en ont bénéficié ont été d’une discrétion… Je me suis trouvé seul. Je le dis gentiment mais je le dis quand même. »

« Il nous prend vraiment pour des cons ! »

Dans la salle, on s’amuse devant ces effets de manche. La séance est finalement beaucoup plus divertissante que les précédentes rencontres avec Juppé puis Fillon. Mais l’on s’agace aussi. Une chef d’entreprise se penche vers son voisin et lui glisse, assez fort pour qu’on l’entende d’une autre table : « Il nous prend vraiment pour des cons ! »

Sur l’estrade, Nicolas Sarkozy poursuit son plaidoyer pro domo : « Ne jetez pas le bébé avec l’eau du bain. Entre 2007 et 2012, c’est la première fois que la droite est au pouvoir et qu’elle ne recule pas devant la rue. Le CPE, le CIP,… j’ai bien des défauts mais ce n’était pas moi ! ».  

Celui dont même les proches regrettent le manque de travail sur le fond, présente une esquisse de projet économique. Comme Juppé et Bayrou avant lui, il souhaite à présent mettre l’accent sur une poignée de mesures prioritaires pour le prochain quinquennat comme le vote d’un projet de loi de réduction de la dépense publique dès juillet 2017 et l’alignement de la fiscalité des entreprises sur la moyenne de nos partenaires européens.

Au passage, il se livre à son exercice favori : éreinter « Monsieur Hollande » , qui a « réussi l’exploit de réduire le nombre d’emplois familiaux pour la première fois depuis 1993 et que dans le même temps, les femmes fassent moins d’enfants. » Mais il n’oublie pas son objectif primaire. « Les ordonnances, c’est la fausse bonne idée par excellence. Jacques Chirac l’avait fait avec Alain Juppé en 1995. Non il faut un peu plus de dynamisme, moins de politique et de frilosité », lance-t-il, critique à peine voilée de la personnalité du maire de Bordeaux. Selon une technique bien éprouvée (quoi de mieux pour détourner l’attention quand la justice le guette ?), il conclut par cette presque-déclaration de candidature : « La France, c’est pas fini, pas foutu, la France est grande ou elle ne l’est pas, moi je n’y renonce pas. » 

 

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