"Merci patron !" censuré au "Parisien" : "La liberté de la presse est menacée"

Dans un communiqué, des syndicats de journalistes du « Parisien » dénoncent la « censure » dont a été victime selon eux le film « Merci patron ! » de François Ruffin dans leurs pages. Pour le fondateur du journal « Fakir », ce nouvel épisode confirme bien que l’on a « essayé de passer le film à la trappe ».

François Ruffin, journaliste et réalisateur du film Merci patron !, a vraiment bien choisi son titre. Car depuis la sortie en salle de cet Ovni cinématographique, les efforts déployés pour le censurer ont eu l’exact effet inverse. Lui garantissant au contraire un maximum de visibilité médiatique. Après l’annulation à la dernière minute de l’invitation du fondateur et rédacteur en chef du journal Fakir sur Europe 1 qui, face à l’émotion suscitée, l’avait finalement réinvité face à un Jean-Michel Aphatie remonté comme un coucou, des syndicats du journal Le Parisien ont publié ce mercredi un communiqué intitulé « Le film Merci patron ! censuré au Parisien ».

Conjointement signé par le SNJ, FO, SNJ-CGT et la SDJ, le communiqué dénonce la décision « assumée » du directeur des rédactions, Stéphane Albouy, de ne pas parler du film : « Ordre a été donné aux confrères du service culture-spectacle qui avaient visionné le long métrage de ne pas le chroniquer, fût-ce en 10 lignes. De même a été repoussée plus tard une proposition de sujet du service politique sur le buzz suscité à gauche par le film sous prétexte qu’il s’agissait ‘d’un sujet militant’, ‘et qu’il y avait d’autres sujets prioritaires ce jour-là’. L’argument est étonnant car s’il ne faut plus parler dans nos colonnes des actes militants, la rubrique politique a-t-elle encore une raison d’être ? ». Plus qu’un cas de censure, les journalistes parlent « d’auto-censure » pour éviter, semble-t-il, de fâcher le propriétaire du journal depuis l’année dernière …Bernard Arnault. Le patron de LVMH est en effet au centre du film de François Ruffin. 

Selon les syndicats du Parisien, Stéphane Albouy aurait justifié sa décision par sa volonté de ne « pas, même en 10 lignes, faire la promotion d’un procédé déloyal, malhonnête qui a instrumentalisé les Klur », ce couple licencié par une filiale d’LVMH qu’accompagne Ruffin dans sa croisade contre Bernard Arnault. « Au final, le choix retenu est toxique : le silence pour lequel a opté le directeur de la rédaction est un message dangereux envoyé à l’actionnaire LVMH », conclut le communiqué

« Ils ne peuvent plus nier qu’ils ont essayé de passer mon film à la trappe »

« Je ne veux pas me poser en martyr des médias mais il y a un certain nombre de cas d’auto-censure dans la presse. Nous en avions l’intuition avant la sortie du film. Cela ne fait que les confirmer », analyse François Ruffin, contacté par Marianne. Et de saluer le « courage » des journalistes du Parisien d’avoir mis sur la place publique les agissements de leur directeur des rédactions. Pour le fondateur de Fakir, l’épisode d’Europe 1 suivi de ces nouvelles révélations démontrent bien que « la liberté de la presse est menacée par la détention de la propriété des moyens de production par ces grands capitalistes qui se connaissent, se côtoient… Ils ne peuvent plus nier qu’ils ont essayé de passer mon film à la trappe ». Le réalisateur rapporte aussi cette anedocte au sujet d’un journaliste d’un média national qui, après avoir visionné Merci patron !, lui a confié que son film « donne envie de devenir bolchevique mais que malheureusement, il ne pourrait pas en parler au risque de faire perdre les budgets publicités à son journal ».

Reste que si Ruffin remercie « chaleureusement » Largardère, Arnault & co « pour ce plan de communication » qui a permis à son film de faire le « buzz », il souhaite maintenant passer à une autre étape : « On parle beaucoup de ‘Merci patron !’ grâce à cette grossière censure dont il est victime. J’aimerais bien qu’on en parle sur le fond aussi, qu’il soit pris au sérieux comme un objet de débat. Ce film pose un certain nombre de questions, politiques, économiques ou sur la précarité ». Des problématiques qui, fait-il remarquer, entrent en totale résonnance avec la loi El Khomri.« Moi, par exemple, je suis disponible pour faire un débat avec Dominique Seux (Directeur délégué de la rédaction des Echos, également propriété de Bernard Arnault, ndlr) sur ce que soulève mon film ».  L’invitation est lancée…

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