Au moment où s’ouvre le Forum économique de Davos, deux rapports internationaux viennent contredire les prédictions de ceux qui voient en la libéralisation et la numérisation de l’économie la solution miracle face au chômage de masse.
Les voix les plus libérales de France et de Navarre le psalmodient depuis des années : pour retrouver le chemin de l’emploi, il faut li-bé-ra-li-ser l’économie. Éradiquons les cancers des acquis sociaux, les normes, le code du travail, le salaire minimum, l’encadrement du temps de travail, les cotisations sociales ; embrassons les accords de libre-échange du type Tafta et le monde retrouvera comme par extraordinaire le chemin du plein-emploi.
Seulement voilà, le dernier rapport de l’Organisation internationale du travail (OIT) sur l’emploi dans le monde vient contredire cette vision. Sur une planète largement libéralisée, où les pays contraints par l’affreux héritage du socialisme se comptent sur les doigts de la main, l’OIT montre que « la crise mondiale de l’emploi n’est pas près de prendre fin ». Les estimations de l’organisations tablent sur 197,1 million de chômeurs pour 2015 et 199,4 millions pour 2016. La barre des 200 millions serait allègrement franchie en 2017, avec 1,1 millions de chômeurs supplémentaires par rapport à 2016.
L’OIT insiste par ailleurs sur la mauvaise santé des économies émergentes comme la Chine, que l’on peut difficilement accuser de surprotéger ses travailleurs. Cité par Le Monde, Raymond Torres, directeur du département de la recherche à l’OIT et responsable du rapport sur l’emploi, qualifie le document de « plus alarmiste que les éditions précédentes », notamment parce que les « amortisseurs sociaux » de ces pays en développement « y sont plus faibles » qu’en Occident.
Et si la solution était du côté de la révolution numérique ? Mauvaise pioche : dans un rapport publié le 13 janvier et intitulé « Les dividendes du numérique », la Banque mondiale constate que les bénéfices attendus de la révolution numérique, soit « une plus grande productivité, davantage d’opportunités pour les pauvres et la classe moyenne, des pouvoirs publics et des entreprises plus responsables » ne se sont pas répandus « aussi largement qu’escompté ».
Par ailleurs, « ce sont les personnes riches, compétentes et influentes à travers le monde » qui sont « mieux placées pour tirer parti des nouvelles technologies ». Traduction pour le commun des mortels : le digital laisse les moins favorisés sur le bord de la route, comme au bon vieux temps. À l’autre bout de l’échelle, « de nombreux travailleurs » doivent « rivaliser pour des emplois faiblement rémunérés », pour ceux qui ont encore l’opportunité d’être dans la course. En clair, la révolution numérique c’est « la grande arnaque », comme l’écrivait Marianne dans son édition du 4 décembre. Ni la digitalisation du monde, ni sa conversion au libéralisme économique n’ont résolu le fléau du chômage. Caramba, encore raté.
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