Thierry Breton : "la gestion de la crise de 2007 à 2012 a été la plus mauvaise de toute l'Europe"

Thierry Breton, ancien ministre de Jacques Chirac, était ce matin sur France Inter. Un intervention surprenante durant laquelle il a tour à tour défendu la politique de formation de François Hollande, critiqué Nicolas Sarkozy et lancé l’idée d’une mutualisation des dettes de défense des pays européens.

On l’avait presque oublié celui-là, et pourtant. Thierry Breton, ancien ministre de l’Economie sous Jacques Chirac, devenu depuis PDG d’Atos, n’a pas fait dans l’attendu ce matin, au micro de France Inter. On aurait pu imaginer que cet ancien ministre de droite, au lendemain du plan d’urgence sur l’emploi annoncé par François Hollande, se serait lancé dans une diatribe sans fin contre les « mesurettes » de ce gouvernement, son incompétence, et qu’un gouvernement de droite ferait beaucoup mieux. Une prose convenue et habituelle dans ce théâtre tragi-comique qu’aiment à nous donner nos hommes politiques. Ce ne fût pas le cas.

Interrogé sur les raisons de cette crise sans fin sur le front de l’emploi et celui de l’économie qui touche la France, l’ancien ministre a eu cette réponse surprenante : « On a eu une gestion de la crise entre 2007 et 2012 qui a été la plus mauvaise de tous les pays européens », a-t-il lâché, devant une Léa Salamé prise de court. Et de poursuivre sur la même tonalité : « On a augmenté la dette de la France de 600 milliards d’euros, on a décroché totalement par rapport à l’Allemagne (…) ce décrochage est absolument tragique pour la construction européenne et pour l’avenir de nos concitoyens ». Et vlan pour Sarko ! Même les socialistes, depuis leur arrivé au pouvoir, n’avaient osé faire un inventaire si cruel de la gestion sarkozyste de la crise. Il faudra donc rajouter Thierry Breton, à la longue liste de ces hommes de droite qui n’ont plus peur de critiquer le tenancier des LR.

Questionné sur le plan formation de François Hollande annoncé hier – 500.000 chômeurs formés de prévu – là encore, le PDG d’Atos, est allé là où on ne l’attendait pas : « On sait que lorsque l’on est au chômage et que l’on suit une formation, pour 57% des personnes qui sont dans cette situation, ils retrouvent un emploi dans les six mois », validant ainsi la proposition du président de la République. Une montée au créneau pour défendre la politique économique et sociale d’un François Hollande qui n’en demandait sûrement pas tant.

Surprenant Thierry Breton donc. Innovant aussi sur le plan de européen.

Mutualiser les dettes de défense des pats européens

« L’un des sujets essentiels pour l’Europe c’est la mutualisation de notre défense. L’Europe a baissé ses dépenses de défense de 10 %, pendant que la Chine les a augmentées de 167%, l’Inde de 35% et les Etats-Unis sont restés au même niveau. Nous décrochons alors que les défis sont là », a-t-il expliqué ce matin. D’où l’idée de créer un grand fond européen pour mutualiser les dettes et ainsi relancer cette Europe de la Défense qui pâtit des restrictions budgétaires et du manque de volonté politique malgré l’urgence. « Il ne s’agit pas d’effacer les dettes, une dette est faite pour être remboursée. La France a dépensé 730 milliards dans sa défense quand l’Allemagne a dépensé 500 milliards, l’Italie 400, l’Espagne 200. L’idée que je propose c’est de reprendre cette dette dans un fond, ça fait 2.300 milliards, avec des obligations à 50 ans« , a-t-il notamment défendu. L’intervention au Mali ou la participation de la France dans la coalition contre Daesh sont autant d’opérations qui profitent à la défense de l’ensemble des pays européens. Et pourtant, la France se retrouve seule à asssumer ces dépenses. Déjà, en 2013, le gouvernement avait défendu timidement une participation financière de l’ensemble des pays européens aux opérations militaires françaises. Plus récemment, après les attaques du 13 novembre, le président avait rappelé que « le pacte de sécurité l’emporte sur le pacte de stabilité ».

La proposition de Thierry Breton va bien plus loin et pourrait ainsi lancer un embryon d’Europe de la défense. D’autant que ce fond serait bien utile sur le terrain comptable : « On aura ainsi une dette de la France ramenée à 61 %, celle de l’Allemagne à 55 % », selon ses calculs. Avec une dette de la France qui s’approche des 100% de son PIB, ce dernier argument a de quoi séduire. Mais ces idées seront-elles entendues ? Rien n’est moins sûr…

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